Après la chute du Gouvernement Berlusconi dimanche dernier j’ai tenu a rédiger un petit billet sur Silvio Berlusconi pour ne pas que l’on oubli comment l’entrepreneur et première fortune transalpine, est devenu un ténor politique en dix sept années de pouvoir.
Bonne lecture !
@romainbgb – 17/11/2011
« J’ai décidé d’entrer dans le jeu et de prendre en charge l’intérêt général
car je ne veux pas vivre dans un pays anti-libéral,
gouverné par des forces immatures et par des hommes indissolublement liés
à un passé politiquement et économiquement désastreux »
Silvio Berlusconi, le 26 janvier 19941.
C’est ainsi que Silvio Berlusconi a annoncé son entrée en politique le 26 janvier 1994 par une cassette vidéo retransmise à la télévision. Son néo-parti, Forza Italia, créé pendant l’automne 1993 réussit à receuillir 8 millions de voix (21% des suffrages exprimés) aux élections législatives de mars 1994 et devient le premier parti politique italien.
L’entrepreneur italien Silvio Berlusconi est au centre du débat public en Europe. Sa nomination à la Présidence du Conseil des ministres pour la première fois en 1994 (bien qu’éphémère) eut l’effet d’une bombe dans le champ politique aussi bien transalpin qu’européen. Contre toute attente, Silvio Berlusconi a réussi à reconquérir le pouvoir en 2001 pour le conserver jusqu’à la fin de la législature en 2006. Le mélange de libéralisme et de néo populisme qui en a fait sa force, est devenu un modèle pour certain ou un anti-modèle pour d’autre.
L’entrée en politique de Silvio Berlusconi n’a rien de neuf, puisque cela fait plus de quinze ans que son nom est associé avec la vie politique italienne. En décembre 1992, dans un supermarché du Nord de l’Italie il affirmera sa volonté de descendre dans l’arene politique italienne : ce qui entraine une coupure net du monde politique italien en deux.
D’un côté une vision pessimiste de Silvio Berlusconi, avec le problème des conflits d’intérets et le fait qu’il ne soit pas juste que cette personne est un poste aussi élevé.
De l’autre, en Italie est apparu un phénomène avec Berlusconi, qui ne s’est jamais présenté ailleurs et qui ne se présentera peut-être jamais.
Cela produit et soulève une véritable énigme : comment une apparition aussi soudaine que celle de Forza Italia dans le système partisan a-t-elle pu s’enraciner aussi durablement dans le système politique ?
Une grande partie de l’opinion publique européenne libérale et radicale, particulièrement en France et en Allemagne, s’est posé la question sur la valeur de la victoire de Silvio Berlusconi aux élections législatives de 2001. Les méthodes qui l’on porté au pouvoir et la nature de son projet ne sont elles pas les nouvelles forces d’un modèle limité de démocratie européenne, la plus ambitieuse des nombreuses réponses populistes aux mal-être du continent ?
L’effet de bombe provoqué par cette émergence soudaine dans la plus haute sphère politique italienne de Silvio Berlusconi renvoi à l’épineux problème du pouvoir politique dans un pays comme l’Italie. La problématique centrale du débat est reprise dans divers ouvrages aussi bien en France qu’en Italie. De nombreux spécialistes se sont penchés sur la question afin de savoir « Comment l’Italie a-t-elle pu accoucher du phénomène Berlusconi ? »2.
La première séquence occupe une petite année de 1993 à 1994. La seconde séquence lui sera plus prolifique sur la durée car se sera l’unique Président du Conseil depuis la proclamation de la République italienne (1948) qui exercera son mandat jusqu’à la fin (2001-2006) ainsi que celle de son retour (2008-2011).
C’est là où la place jouée par l’empire médiatique de Silvio Berlusconi et le fait d’observer l’utilité dont il use a eu une impact dans la conquête du pouvoir et les foyers italiens. L’ambivalence qu’il exerce sur la scène transalpine devient très vite une ambiguïté dont beaucoup se demandent comment cela est possible. Le chef d’entreprise devenant président du Conseil cela serait-il une exception italienne ou Silvio Berlusconi a-t-il ouvert la voix à de nouvelles perspectives européennes voir mondiales ?
Mais il faut rappeler la fraîcheur et l’innocence de la République italienne afin de lui laisser le bénéfice du doute en ce qui concerne la légitimité des gouvernements qui seront élus.
La prédominance du parti de la Démocratie Chrétienne (avec d’autres facteurs) durant les premières décennies de la République italienne joue un rôle primordial. Dès lors, le rôle exercé par le Parti Communiste italien tient aussi une place importante, notamment dans le contexte de guerre froide dans lequel le monde et l’Europe se trouve au sortir de la Seconde guerre mondiale.
Sur cet effort de reconstruction que l’Italie renaît de ses cendres et doit faire peau neuve suite aux deux décennies fasciste, ce qu’elle choisit en proclamant le 1er janvier 1948 la République italienne, quatre-vingt ans après avoir formé son Unité. Ce qui démontre bien la fragilité de l’Italie en ce qui concerne le système politique en place et la difficulté de cette dernière à maintenir en place le pouvoir. La Rome antique demeure le modèle parfait pour tout un chacun.
Mais tout ceci est un autre débat qui n’a pas lieu d’être ici, mais dont il été important de connaître les éléments afin de poursuivre l’étude de ce mémoire.
À mon sens la phase politique de ces dernières décennies la plus importante au sein de l’Italie, serait bien celle sur le scandale politico financier « Mani Pulite » qui éclaboussa l’Italie des années ’90. S’il est une date à partir de laquelle on peut partir afin de comprendre Silvio Berlusconi ce serait ce moment là, qui avec la fondation de son empire permet l’accession à l’une des plus hautes sphères du pouvoir italien.
Douze milliards huit cents millions de dollars… Le 15 juin 2000, une dépêche provenant de New York égrène les noms des hommes les plus riches du monde établie annuellement par le magazine nord-américain Forbes. Dès la vingt troisième ligne apparaît la plus grosse fortune d’Italie : Silvio Berlusconi. A cela s’ajoute une source de 2007 publiée par la Chambre des Députés italienne qui fait état de 28 millions 033’122 euros déclarés au Fisc italien par M. Berlusconi.3
Le mémoire s’attachera à le fait d’étudier la résistible ascension de Silvio Berlusconi sur la péninsule transalpine, à voir comment il a pu faire main basse sur l’Italie ? Le phénomène Berlusconi dont l’Italie a accouché lui serait-il propre ou pourrait-il être possible de le retrouver dans un autre pays européen ?
L’émergence brutale de Forza Italia est liée aux profondes transformations du système partisan qui ont abouti à ce que l’on appelle la Seconde République. C’est à la suite de ses transformations que le parti et son leader ont émergé. Ils ont en fait profité de la crise générale du système politique de la Première République. Cette crise, soudaine et dramatique, entraîne l’effondrement des partis de gouvernement et témoigne de l’envie de changement présente dans la société italienne.
L’émergence de Forza Italia ne peut pas être comprise si on ne considère pas le rôle personnel de Silvio Berlusconi. En effet, l’émergence de ce parti est entièrement liée aux ressources, au statut et aux intérêts économiques et politiques de son leader-fondateur.
En 1994, Berlusconi et Forza Italia ont construit leur image en opposition et en contraste par rapport à l’ancien régime politique. On suppose donc que leur succès a ses origines dans l’échec du système politique de la Première République. Cette déduction amène un certain nombre d’éléments à expliquer et à analyser.
La généalogie du parcours de Silvio Berlusconi met en évidence deux moments dans la construction du personnage publique. D’abord il y a la longue marche de l’entrepreneur de plus de trente ans (1961-1993) qui lui permet de former un empire de communication, la Fininvest, qui demeure propriété familiale. La suite contient le blitz et le succès politique, durant la dernière décennie (1994-2006), marque la rapide et surprenante conquête du pouvoir politique avant l’exercice, à deux reprises, du poste de Président du Conseil des ministres.
La place de leader politique de Silvio Berlusconi, telle qu’on la connaît aujourd’hui, au sein de la vie politique italienne n’a pas été une mince affaire. Etant donné la forte présence dans les années ’90 de deux coalitions très fortes : celle de la DS (Democrazia di Sinistra) et celle surnommée CAF en honneur de ces dirigeants (Craxi ; Andreotti ; Fanfani).
Une remarque me vient à l’esprit concernant l’éclatement de l’Etat et de la représentation politique. Après le 13 novembre 2011 il faudra aux hommes qui dirigeront l’Italie du courage, de l’autorité, de l’opiniâtreté, pour faire taire ceux qui croient inéluctable le déclin de ce beau pays.
Tout ce que Silvio Berlusconi aura pu faire en dix sept années de politique restera oublié dans la mémoire collective ! Ne restera que le bling bling et le bunga bunga, au détriment des huit années à la tête de la Présidence du Conseil des ministres italiens. Rappelons qu’il est le seul Président du Conseil, depuis la proclamation de la République italienne en 1946, a avoir été au pouvoir jusqu’à la fin de la législature ! Chose que l’on ne verra pas de si tôt en Italie …
Mais face à la crise, l’Italie dispose de considérables gisements d’intelligence, de talent et d’inventivité qui dans la société transalpine, comme dans une partie de ses cercles dirigeants, malgré la détestation dont ces derniers pâtissent. En effet, le salut ne viendra pas seulement de la société civile, comme le prétend certain répandu en Italie et à l’étranger.
La débrouillardise, le dynamisme et l’ingéniosité ne suffiront pas pour relever les défis économiques, scientifiques et technologiques de notre temps. Cela suppose que les élites italiennes sachent refonder leur légitimité et que la crise de la représentation politique soit résolue. Ce qui représente deux des défis récurrents qui jalonnent et orientent la trajectoire de ce pays.
L’équipe gouvernementale de Mario Monti a prêté serment hier matin au Palais du Quirinale devant le Président Napolitano. C’est donc parti pour les seize techniciens que compose le Gouvernement Monti I de se lancer dans les réformes pour que l’Italie sorte de la crise. Super Mario à vous !
Sources :
1 La discesa in campo, Silvio Berlusconi in Una Storia Italiana, pp. 76-77, mars 2001.
2 LAZAR, Marc, L’Italie à la dérive, le moment Berlusconi ; Paris : Editions Perrin, mars 2006.
3 Site Internet du quotidien italien Corriere della Sera du 17.04.07 :http://www.corriere.it/Primo_Piano/Politica/2007/04_Aprile/17/redditi_deputati_camera.shtml