Une liberté normande.
Chers Lecteurs,
Après cette échappée dans un Cabinet ministériel, je vous propose de bien vouloir reprendre le chemin de l’hémicycle national en donnant une nouvelle fois la parole à une élue de la nation.
Histoire et Sciences Politiques. C’est sur les bancs des Universités de Paris I et Paris II que notre interrogé étudiera et obtiendra ses diplômes.
Montivilliers. C’est dans cette petite commune voisine du Havre que notre nouvelle personnalité fera ses premières armes d’élu locale comme conseillère municipale d’opposition.
Conseil Régional de Haute-Normandie. Dix ans après s’être encartée au RPR, notre interrogé fera son entrée dans l’Hémicycle régionale où elle siègera jusqu’en 2004. Elle retrouvera son siège en 2010 jusqu’à la fin des 2 Hémicycles régionaux normands qui fusionneront en 2015 avec la loi NOTRe pour devenir la Région Normandie.
M. Le Maire. C’est d’abord sur les routes des campagnes électorales régionales normandes puis lors de la primaire de la droite et du centre pour la présidentielle de 2017 que notre interrogé intègrera les équipes du ministre en campagne.
Enseignement. C’est en tant qu’enseignante en Économie au Lycée Saint-Joseph du Havre et en Communication pour des BTS, qu’une nouvelle étape de vie de notre interrogé voit le jour.
Fécamp. Nouvelle aventure d’élu locale pour notre interrogé qui deviendra en 2014 la première administrée de la ville normande jusqu’à son élection à la députation en 2022. Elle y demeure conseillère municipale.
Normandie. Dans cette continuité électorale régionale, notre personnalité continuera sa présence dans l’Hémicycle régionale normand en devenant en 2016 Vice-présidente en charge de l’Attractivité du territoire, tourisme et nautisme.
9ème circonscription de Seine-Maritime. Nouvelle corde à son arc électoral en étant élue au Palais Bourbon en juin 2022. Notre personnalité y occupe également le poste de Vice-présidente du groupe Horizons.
Je vous laisse découvrir le portrait de Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, députée de la 9ème circonscription de Seine-Maritime, Vice-présidente du Groupe Horizons à l’Assemblée nationale.
Ce portrait a été réalisé lors d’un entretien en visioconférence le lundi 24 juin 2023.
Bonne lecture !
@romainbgb – 28/07/23
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Biographie Express de Mme Marie-Agnès POUSSIER-WINSBACK :
*1967 : naissance à Nancy (Meurthe-et-Moselle).
– Licence d’Histoire à l’Université Paris I – Panthéon Sorbonne.
– Maîtrise en sciences politiques à l’Université Paris II – Panthéon Assas.
*1995-2001 : conseillère municipale de Montivilliers (Seine-Maritime).
*mars 1998 – mars 2004 : conseillère régionale de Haute-Normandie.
*janv.2000 – mars 2004 : membre de la commission permanente du Conseil Régional de Haute-Normandie.
*2002-2012 : assistante parlementaire de M. Fidelin, député de la 9ème circonscription de Seine-Maritime.
*mars 2004 : candidate (UMP) aux élections régionales de Haute-Normandie.
*juin 2007 : candidate (UMP) aux élections législatives dans la 5ème circonscription de Seine-Maritime.
*janv.-mars 2010 : directrice adjointe de campagne de M. Le Maire, candidat (UMP) aux élections régionales de Haute-Normandie.
*mars 2010 – déc. 2015 : conseillère régionale de Haute-Normandie.
*2012-2014 : professeur d’Économie au Lycée Saint-Joseph – Le Havre.
*mars 2014 – juillet 2022 : maire de Fécamp (Seine-Maritime).
*depuis déc. 2015 : conseillère régionale de Normandie.
*févr. 2016 – juil. 2022 : Vice-présidente du Conseil régional de Normandie, en charge de l’Attractivité du territoire, tourisme et nautisme.
*sept-nov. 2016 : conseillère politique auprès de M. Le Maire, candidat à la primaire de la droite et du centre en vue de l’élection présidentielle de 2017.
*nov.2017 : Chevalier de l’ordre national du Mérite.
*depuis juin 2022 : députée de la 9ème circonscription de Seine-Maritime.
-Vice-présidente du groupe Horizons.
-secrétaire de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République de l’Assemblée nationale.
-secrétaire de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation de l’Assemblée nationale.
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À quoi rêvait la petite Marie-Agnès lorsqu’elle était enfant ?
« Elle rêvait d’être totalement libre ! Mes parents me disaient qu’il fallait que je sois totalement libre. Ce qui est bizarre au regard du parcours qui est le mien. Je me souviens que c’était cela.
« Curieusement, j’aimais les métiers avec des uniformes. Il semblerait que lorsque j’étais petite, je disais que je voulais être préfète ou pilote de ligne. Comme je ne vois pas de lien, je me suis dit que peut-être je me suis imaginé parce que c’était des uniformes. Mes parents se sont toujours demandé comment je pouvais dire préfète à 6 ans. La première fois que j’ai dit cela, cela avait apparemment interloqué tout le monde en se demandant d’où je sortais cette envie. Évidemment que je ne pouvais pas savoir ce que c’était. J’avais vu des préfets. Sans doute que je trouvais beau cet uniforme.
« Il n’y avait pas de femme, à mon époque, qui faisait ce métier. Ce qui avait dû me plaire sans doute aussi c’est de me dire que je serais la première. »
Comment est née votre rencontre avec la politique ?
« Je suis née dans un milieu où la politique était au cœur des conversations et l’engagement politique très fort du côté de mon père, chez les Winsback. Mon père a été engagé. Il a été élu local aussi. Par contre, ce qui les distinguait chez les Winsback c’était la liberté et donc on n’avait pas de carte dans les partis politiques. C’était impossible ! Il fallait rester libre.
« Pour ma part, en 1988, lorsque Jacques Chirac perd les élections présidentielles, je suis désespérée. Je me dis que je n’ai pas le droit de me plaindre parce que je n’ai rien fait. Là, je décide de m’engager. Je me dis : « On ne peut pas être désespéré par une situation s’il on n’a rien fait ! » Je décide que je vais prendre ma carte au RPR. Je vais militer. Je vais m’engager pour ne plus être dans une situation où je serai désespérée, sans avoir jamais rien fait. Je me rappelle de mon premier engagement en politique.
« Je m’y intéressait déjà auparavant. Je me souviens en 1981, lorsque François Mitterrand est devenu président, j’étais encore toute jeune et pas en âge de voter. Ce fut déjà embêtant pour moi. J’allais voter avec mes parents. Je prenais tous les bulletins de vote. Je demandais une enveloppe. Je les gardais. Je me souviens avant mes 10 ans de le faire avec eux.
« Vraiment, l’engagement militant, je vais faire campagne, je vais militer et m’engager etc… Celui-ci intervient à mes 21 ans quand Jacques Chirac a perdu la présidentielle. »
Que retenez-vous de vos années de conseillère régionale de Haute-Normandie ?
« En fait, mon premier mandat d’élu local est en 1995, en tant que conseillère municipale dans une petite commune : Montivilliers. Je l’ai été jusqu’en 2001. J’y suis resté tout le mandat. C’est une petite commune près du Havre. Mon mari travaillait au Havre et moi également. Nous y louions une petite maison. J’étais conseillère municipale d’opposition à Montivilliers. C’était une commune dont je n’étais pas originaire.
« En 1998, je suis devenu conseillère régionale jusqu’en 2004. Puis en 2004, il y a une fusion des listes entre celle d’Hervé Morin et d’Antoine Rufenacht entre le 1er et le 2ème Tour. Je perds ma place.
« J’ai beaucoup appris de ce mandat. C’était dur. L’élection de 1998 est très compliquée. On perd la Région. Vous savez, c’est l’époque où le Front National rentre dans les Régions de façon assez forte. On avait été élu grâce aux voix du Front National pour quelques heures, avant que notre candidat ne démissionne, ne voulant pas être élu par les voix du FN.
« Cela avait été très violent. On dit qu’aujourd’hui la politique c’est violent. Je me souviens de manifestations énormes, des œufs qui se baladaient… Cela avait été très tendu cette élection du président du Conseil régional. Cela veut dire que très jeune, je suis mis dans l’histoire. Je comprends que c’est un peu compliqué. Voilà ce que j’en retiens.
« Tout ceci avec des personnes qui font de la politique depuis des années et des années parce que je suis avec des élus comme Jean-Claude Remy dans l’Eure ou Antoine Rufenacht. Ce sont des personnes qui pratiquent la politique depuis des années. Ce qui me permet d’apprendre très vite. J’apprends. J’observe. Je vois. Et j’aime ! [Rires] »
Que retenez-vous des moments auprès de M. Le Maire lors des élections normandes en 2010 et la primaire à la présidentielle de 2017 ?
« Je me souviens d’abord qu’il était secrétaire d’État en charge des Affaires européennes. Son Cabinet m’appelle en me disant que M. Le Maire souhaitait me rencontrer. Je demande à quel sujet ? On insiste en me disant qu’il veut me rencontrer. Disons que lorsqu’un ministre vous appelle en vous disant qu’il veut vous rencontrer : vous y aller ! Même si l’on n’a pas voulu vraiment me répondre pourquoi. J’arrive à Paris et en fait il a dû être rappeler à Bruxelles, le temps de mon trajet en train. Je suis donc reçu par un jeune attaché parlementaire qui est là, chargé de ses affaires privées, qui s’appelle Sébastien Lecornu. Il me dit : « On vous a repéré. Le ministre ne peut pas vous recevoir mais je vais vous dire pourquoi il veut vous voir. »
« J’étais candidate aux législatives en 2007. On m’a présenté dans une circonscription où je savais que j’avais aucune chance de gagner contre Christophe Bouillon. Je le savais parfaitement. J’avais fait trembler au 1er Tour le candidat inamovible de la Fabiusie et que j’avais fait campagne toute seule etc… Je m’étais fait apparemment repérer part certains.
« Ce qui me plait à ce moment c’est que Sébastien Lecornu me dit que « l’on souhaiterait que vous travailliez avec nous parce que vous êtes libre ! Évidemment vous êtes soutenue par les uns, les autres, mais vous ne faites pas partie d’une écurie. Ce qui nous intéresse. Est-ce que donc vous serez intéressé d’être en charge de la campagne, en Seine-Maritime ? » Je dis que sur le principe j’en parle avec mon mari. En fait, lorsque je sors, je sais que je vais dire oui ! Je ne le dis pas de suite mais je trouve que cela est super intéressant.
« Pardon mais je trouve que ce mot « libre » revient beaucoup. Mes rêves de petite fille sont toujours ceux-là.
« Je découvre que c’est une équipe qui est très sympa. Je rencontre Bruno Le Maire qui s’y investit beaucoup. C’était amusant parce qu’il n’aimait pas du tout avoir un chauffeur. Il adore conduire. Ce qui était un peu galère sur les chemins de campagne parce que nous avions un véhicule de 8-9 places. On était tous dans la camionnette. Bruno Le Maire était appelé par le Premier ministre ou quelqu’un d’autre. Il fallait que l’on se gare. Il sortait de la voiture passer son appel. On attendait dans la voiture. [Rires] C’était assez amusant ! C’était vraiment chouette. J’ai passé des moments très sympas.
« En même temps de la rigueur, du travail. Puis d’un autre niveau puisque là aussi on avait à faire à quelqu’un de très organiser. Plus en termes de ce qu’il fallait faire qu’en terme de moyens financiers. On n’avait pas franchement énormément de moyens.
« Puis lorsque l’on part pour la primaire, on est tout seul ! Quand Bruno Le Maire décide de partir à la Primaire, on est 6. On divise la France en 6. Parce qu’au départ, quand on commence à travailler sur la Primaire, je suis responsable de secteur. Mon secteur c’est la Région Centre, le Nord-Pas-de-Calais et la Normandie. Vous voyez un secteur bien grand.
« Au départ, on était avec le ministre, qui n’était plus ministre. On partait deux jours par semaine sur notre secteur avec notre petite valise et puis on allait organiser des réunions ici, ou dans le Nord, ou dans la Région Centre où parfois l’on rencontrait que 30 militants.
« Parfois le personnage de Bruno Le Maire est perçu comme étant un peu froid, techno. Ce n’est pas du tout la vision que j’en ai parce que je l’ai vu capable de militer. Lorsque vous arriver dans une salle de 30 personnes alors que vous avez été directeur de Cabinet du Premier ministre, de ministre et que vous avez été ministre vous-même.
« À l’époque, il n’y avait plus de journalistes à nos côtés. Quand on rentrait dans un troquet, personne ne savait qui c’était. Il restait ½ heure à écouter les gens, leur demander ce qu’ils pensaient de telle chose. J’ai connu Bruno Le Maire comme cela, vraiment ! »
Que retenez-vous de votre poste d’enseignante d’Économie au Lycée au Havre ?
« J’ai vraiment beaucoup aimé. Je m’interroge souvent pour reprendre, même si je ne sais pas comment le recaser. Ma première année de mandat à l’Assemblée est faite. Je me dis que peut-être je vais essayer de reprendre des interventions de temps en temps. Cela me manque. Peut-être, du reste, plutôt dans des domaines spécialisés ou pour du supérieur. J’aimais bien l’échange que j’avais avec mes élèves.
« J’essaye malgré tout d’être assez pédagogique dans mes interventions. Je trouve que l’on ne l’est pas assez en politique. On pense que plus l’on sait… alors qu’en fait non, personne ne sait ! Pourquoi n’est-on pas tout le temps en Hémicycle ?! Parce que l’on est en Commission. Vous voyez souvent j’essaye d’expliquer les situations.
« J’ai beaucoup aimé cette période où j’ai été en effet enseignante en Économie et puis enseignante en Communication pour des BTS. Je me suis très vite rendu compte, lorsque j’ai été élue maire, que je ne pouvais absolument pas continuer. »
Comment avez-vous vécu votre mandat de maire de Fécamp ?
« Au début, une surprise totale. Je ne m’attendais absolument pas à être élue. Sur le papier, c’était impossible ! C’est une très grande surprise.
« J’ai travaillé comme une dingue, vraiment ! J’avais l’impression, la première année, dès que j’ouvrai un dossier, il y en avait 10 qui s’ouvraient derrière. C’était vraiment impressionnant. J’étais aussi présidente de l’Agglomération. Il y avait les 2.
« C’est un mandat passionnant parce que vous êtes au plus près. Vous vous rendez compte aussi des lourdeurs administratives. Vous vous rendez compte que parfois il y a des petits riens qui peuvent tout changer. J’ai aimé jongler entre cette capacité à faire des petites choses qui peuvent changer (une poubelle, 2 arbres, une attention à un moment donné sur un quartier…) et puis essayer de concevoir aussi des grands projets comme réhabiliter des friches ou d’aller au bout des projets qui avaient été engagés par mes prédécesseurs.
« J’ai aimé cette action. C’est très formateur. »
En 2015, la Région Normandie voit le jour. Comment avez-vous vécu ce moment ?
« Comme une évidence !
« Je me rendais bien compte qu’à chaque fois que je discutais avec des personnes qui n’étaient pas Normands, jamais je ne disais que j’étais « haut-Normande » ! Quand vous sortiez de la Région, vous disiez que vous étiez Normand, point ! Cela paraissait en fait évident.
« Cela s’est très bien passé parce que pour moi Hervé Morin est un très bon président de Région. J’ai aucune hésitation là-dessus. C’est parce que quand on a été maire de Fécamp on ne peut pas faire autrement que de rester conseillère municipale. C’est un devoir devant mes administrés. Cela m’a vraiment fait de la peine de quitter la Région. J’ai adoré ce mandat. J’avais en charge de l’Attractivité du territoire avec de gros enjeux, le tourisme et le nautisme. »
Comment avez-vous vécu votre mandat au Conseil régional de Normandie comme Vice-présidente en charge de l’Attractivité du territoire, tourisme et nautisme ?
« Je me suis éclaté ! Il n’y a pas d’autre mot. Vraiment !
« En ce qui concerne Fécamp et l’Agglomération de Fécamp Caux Littoral, on a un vrai sujet financier. On n’est pas riches du tout. Vous avez beaucoup de freins au regard des finances publiques. J’étais à la tête de l’exécutif à la Région Normandie. Ce n’est pas du tout la même pression.
« À la Région, j’ai trouvé que c’était formidable parce que d’abord, quelque part, je n’étais qu’adjointe. Le président nous faisait totalement confiance. En plus, c’était des sujets qu’il aimait beaucoup. Les contacts étaient très importants avec lui sur ces sujets-là. Mais surtout on a les moyens. Ce qui signifie que lorsque vous avez des idées et qu’en prime vous pouvez les mettre en pratique. C’est évidemment tout de suite beaucoup plus intéressant et plus facile. J’ai vraiment beaucoup aimé y travailler. On a mis en place l’Agence de l’attractivité, qui était présidé par Philippe Augier. J’ai beaucoup travaillé avec lui. C’est un grand Monsieur du Tourisme, même s’il on n’est pas du tout sur les mêmes cibles entre Fécamp et Deauville.
« J’avais plein de choses à apprendre. Je suis très heureuse qu’il ait pu me les apprendre. D’abord à travers le réseau et cela a servi aussi pour mon propre territoire. J’ai vu ce que les autres faisaient et cela m’a servi. Souvent, lorsque vous êtes maire, vous êtes un peu replié sur vous. Vous avez tellement de choses qui vous arrivent dessus que c’est important aussi d’avoir des relations avec l’extérieur, d’être curieuse, de savoir ce que font les autres, pour éviter de faire des bêtises. Ceci pour de ne pas commettre d’erreur ou au contraire de se servir de leurs expériences pour faire, d’y mettre votre patte. J’avais vraiment besoin de sortir de l’isolement de la fonction de maire et de voir ailleurs ce qui se faisait. Tout ceci en pouvant échanger les pratiques.
« Cela vient peut-être de ma psychologie à 2 sous, pardon, mais je suis l’aînée de 5 enfants. J’ai été en pension. J’ai besoin des autres. Le groupe est hyper important pour moi. Je trouvais que la Région était une sorte de lieu où j’apprenais beaucoup. Je pouvais revenir nourrie dans mes dossiers municipaux et/ou intercommunaux. »
Comment avez-vous vécu la campagne présidentielle de 2017 ?
« Je pense un peu comme pour beaucoup de monde : navrée. J’ai dû passer par pas mal d’état. J’ai été en colère. J’ai été navrée. Même si, au fond, je suis tout de même resté fidèle jusqu’au bout. J’ai été assez étonnée curieusement de voir que malgré la campagne qui avait été faite, le candidat Fillon avait tout de même fait 20%. Je m’attendais à ce qu’il soit beaucoup plus bas. Un vrai sentiment de gâchis.
« Oui, j’ai été en colère parce que pour moi, si François Fillon avait gagné la primaire c’était essentiellement sur ses valeurs qui avaient été mise en avant, notamment face à Alain Juppé et Nicolas Sarkozy. J’ai donc été en colère qu’il puisse se faire rattraper de cette manière-là. Mais pour autant je ne l’ai pas lâché. J’ai fait campagne. »
Quel regard portez-vous sur la campagne présidentielle de 2022 ?
« En fait j’ai l’impression qu’il n’y a quasiment pas eu de campagne par rapport aux autres campagnes que j’ai vécu. Peut-être parce que j’étais maire et pour le coup j’étais moins à l’aise parce que j’étais dans un parti qui ne soutenais pas la candidate que je soutenais. Ce n’était pas obligatoirement confortable.
« J’ai surtout l’impression que l’on n’était pas allé sur le fond. J’ai vraiment eu ce sentiment chez tous les candidats. Bien évidemment j’écoutais essentiellement Valérie Pécresse et Emmanuel Macron. J’ai eu le sentiment en tous les cas qu’ils n’arrivaient pas à percer dans la population. Tous les sujets que l’on a essayé d’aborder, cela ne marchait pas. Cela n’imprimait pas. »
Vous devenez députée de la 9ème circonscription de Seine-Maritime en juin 2022. Comment avez-vous vécu ce moment ?
« Pour commencer, une bonne partie de la soirée je pense que je suis battue. Les premiers résultats que j’ai ne sont pas bons du tout. Le RN fait un score incroyable. En même temps je le savais parce que Marine Le Pen était majoritaire à la présidentielle dans la circonscription. Je ne pouvais donc pas m’étonner que le score soit très important, mais là, il l’est vraiment ; notamment en milieu rural où il est extrêmement fort.
« Quand vous êtes élue, vous êtes heureuse. Vous êtes en même temps un peu inquiète parce que derrière il faut que vous assuriez votre succession et donc vous n’êtes pas complétement sereine. Il faut laisser la mairie. Il faut laisser l’Agglomération. Il faut laisser la Région. Il faut tout laisser. »
Quel regard portez-vous sur votre mandat de députée ?
« Je trouve effectivement que le rythme est difficile. C’est physiquement compliqué. On travaille très tard le soir, parfois la nuit. On commence tôt le matin. On a un rythme soutenu. On travaille 7 jours sur 7 parce que lorsque l’on rentre en circonscription évidemment qu’il faut être présent partout.
« C’est bien différent d’un député d’un arrondissement ou d’une partie d’une grande ville. On ne fait pas le même métier, cela est sûr. On n’a pas les mêmes fonctions. Et encore je ne suis pas la plus mal lotie du Département. J’ai des collègues voisins où ils ont plus de 200 Communes. D’un point à un autre de ma circonscription je peux mettre 1 heure et 1/4. Quand je dois aller d’un point à un autre je perds beaucoup de temps en voiture. On voit bien que cela demande de la présence sur le terrain et d’être très organisé.
« En même temps, je trouve que c’est super agréable parce que lorsque l’on parle de la solitude des élus locaux, même si vous avez une équipe, lorsque vous exercez la fonction de maire, c’est vous qui avez toutes les responsabilités. Là, on a des responsabilités morales, mais pas pénales. Je suis toujours très en lien avec le maire de Fécamp. Mon téléphone sonne toujours. Lors des dernières émeutes, j’étais présente avec lui toute la nuit. Je ne le laisse pas seul. Mais je veux dire que quelque part, moi je n’ai plus tout cela.
« Au contraire, j’ai un groupe politique. Lorsque l’on a des hésitations c’est chouette de pouvoir confronter nos points de vues, de pouvoir définir une stratégie de groupe. On est dans une majorité aussi. On peut confronter nos différentes idées. Comme je vous le disais, paradoxalement, j’aime être libre mais j’aime aussi l’idée d’être dans des groupes, de pouvoir échanger, de pouvoir partager, de pouvoir structurer mes idées, de les avancer aussi en les partageant avec les autres. Je trouve que cela est très intéressant pour cela. Même si cela c’est 3 jours par semaine parce qu’évidemment on est à nouveau seul quand on retourne dans nos circonscriptions. Je trouve que c’est passionnant.
« D’abord, cela vous fait rencontrer des personnes différentes. J’ai fait de très belles rencontres parmi les députés, parmi les agents de l’Assemblée et puis tous ceux que vous pouvez rencontrer en dehors.
« Lorsque Bruno Le Maire et Roland Lescure me confient d’être pilote d’un groupe sur la réhabilitation des friches cela me permet de découvrir le monde de l’industrie, ses acteurs, d’autres élu. C’est passionnant. »
Comment vivez-vous votre rôle de Vice-présidente de groupe à l’Assemblée ?
« Il faut que l’on trouve nos marques. Dans un groupe politique, le président c’est le président, point ! C’est comme cela que cela se passe. On est très complémentaire je pense. Le président est beaucoup en réunion. Il est souvent très pris dans les institutions et les ministères. Je suis donc plus présente auprès de mes collègues lorsqu’ils ont besoin de quelque chose, savoir comment ils vont. J’essaye de faire du lien entre les uns et les autres pour faire en sorte que chacun se sente bien dans ce groupe.
« Je n’ai pas encore été très présente le lundi à cause d’engagements mais à partir de septembre je serai présente aux réunions des groupes de la majorité présidentielle où les présidents et les Vice-présidents se retrouvent. C’est le moment où l’on définit l’agenda de la semaine, quelles vont être nos positions ? Comment on les avance ? Ce qui est très intéressant. »
Quel rapport avez-vous avec les réseaux sociaux ?
« Je déteste la polémique. Ce qui est déjà un premier point. J’ai horreur de la polémique gratuite. Je déteste cela, vraiment. Je suis totalement en phase avec nos 2 présidents, notre président de groupe et notre président de parti, qui considère que la provocation c’est n’importe quoi. Cela ne sert à rien si ce n’est qu’à opposer. Je trouve que l’on est à un moment dans notre vie politique où ce qui m’inquiète le plus c’est justement ces espèces d’affrontements qu’il y a entre les complotistes, les je ne sais quoi et les autres. On manque cruellement de temps, d’union, de rapprochements entre les uns et les autres. Je suis assez inquiète de cela.
« Sur les réseaux sociaux je ne fais donc absolument pas de provocation. Je ne passe pas mon temps à regarder tout cela. Je m’en sers pour faire savoir ce que je fais, point à la ligne. Je ne rentre pas dans les polémiques. Je ne veux pas. Je me rends bien compte que les réseaux sociaux, selon ce que vous utilisez, c’est très différent. Sur Twitter, c’est d’une violence incroyable ! Cela ne me sert absolument pas localement. Au local, il n’y a personne qui est sur Twitter. C’est très parisien ou très politique on va dire. Je relaie sur Twitter mais sans plus.
« Facebook c’est redoutable parce que mes fonctions de députée n’intéresse absolument pas lorsqu’elles se passent à Paris. Je le mets parfois en story. Je ne suis même pas sûr d’y avoir communiqué alors que j’étais rapporteur cette semaine. C’est invraisemblable mais c’est comme cela.
« Par contre je vais dire que je suis allé à telle ou telle inauguration ou évènement local. Il n’y a que cela qui fonctionne sur Facebook. J’ai plus un public local et j’y tiens. Je dois garder mon assise locale. Je n’ai pas ouvert de page députée. Je vois bien que cela ne marche pas. J’ai conservé ma page que j’avais depuis toujours.
« Je lance un site Internet parce que je me rends compte que cela est important aussi, justement pour aller plus sur le fond aussi. Tout ceci sans commentaire. Ce qui est aussi peut-être le côté un peu pédagogique.
« Instagram, je trouve que c’est un peu entre les deux. Comme l’on a un droit de réponse limité. On ne se fait pas attaquer. On reste sur l’aspect photographique. Je suis en train de m’interroger sur mon inscription à TikTok. Je ne souhaite pas me mettre en danger là-dessus. Je ne sais pas. Cela signifierait que je prenne quelqu’un à plein temps pour s’en occuper. »
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Merci à Mme la députée pour sa bienveillance et sa participation à LaLettreR.
Merci à M. Florentin Cognie pour son aide précieuse à la réalisation du portrait.
Un avis sur « Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback »