Portrait d’un jeune député rural.
Chers Lecteurs,
Après avoir évoqué avec vous le portrait d’un député de la Capitale, je vous propose de bien vouloir continuer le chemin de l’entretien en donnant une nouvelle fois la parole à la jeunesse et à la ruralité. Je souhaite partager avec vous le portrait de l’un des plus jeunes députés que compose la nouvelle législature en poursuivant ma mission auprès de vous sur #LaLettreR.
SciencesPo. C’est sur les bancs de du Campus de Dijon, que notre interrogé effectuera ses études qui l’amèneront à l’obtention d’un Master en Affaires Publiques avec une spécialisation au sein des collectivités territoriales.
La Sorbonne. Afin de compléter son cursus universitaire, notre interrogé complétera son parcours avec l’obtention d’un Master 2 en Communication politique et institutionnelle.
Les Portes de l’Essonne. C’est au sein de cette agglomération que notre interrogé fera ses armes professionnelles en devenant chargé de mission auprès du président, dans l’idée de travailler avec le plus jeune maire de France, Robin Reda. L’expérience sera écourtée mais l’apprentissage se poursuivra à la Mairie de Juvisy-sur-Orge, auprès du jeune édile.
#DirectAN. D’une certaine mesure, l’expérience au Palais Bourbon commence ensuite lorsque notre interrogé devient assistant parlementaire, puis conseiller politique en charge de la Presse au sein du groupe LR.
Renaison. Dans cette continuité, le 1er mandat local se concrétise en 2020 lorsque notre interrogé devient Adjoint-au-maire de cette Commune de 300 habitants.
Conseil Départemental du 42. Autre étape importante qui concrétise la carrière politique de notre interrogé lorsqu’à 28 ans, il devient conseiller départemental de la Loire et choisit parmi ses pairs à devenir le président du groupe majoritaire.
#Circo4205. Dans la continuité de son parcours électoral, notre interrogé prend le chemin des urnes en se portant candidat aux élections législatives de juin dernier pour la 5ème circonscription de la Loire. Sa victoire lui permet donc de devenir à 29 ans l’un des plus jeunes députés de la XVIeme Législature et de La Loire, avec son collègue de la 1ère circonscription, Quentin Bataillon.
Je vous laisse découvrir le portrait de M. Antoine Vermorel-Marques, député de la 5ème circonscription de la Loire.
Ce portrait a été réalisé lors d’un entretien dans un café parisien, le 27 septembre 2022.
Bonne lecture !
@romainbgb – 14/10/22
***
Biographie Express de M. Antoine Vermorel-Marques :
*1993 : naissance à Roanne (Loire).
*2011 : Titulaire du Baccalauréat série Économique et Scientifique mention Très Bien.
*2011-2014 : Diplômé du Collège Universitaire avec Cum Laude de SciencesPo Paris.
*2014-2016 : M2 Affaires Publiques (spé collectivités territoriales) à SciencesPo Paris.
*janv-mars2014 : stage d’études au Ministère de la Défense à la Mission de l’ingénierie financière.
*mars-août2014 : stage d’études chez Nextbankers à Londres (Royaume-Uni).
*juil.2014-mars2015 : président de l’association «Touche pas à ma bourse, je la mérite»
*juin2015-juin2016 : chargé de mission auprès du Président de la Communauté d’agglomération les Portes de l’Essonne (Essonne).
*mars2015-juin2017 : coordinateur général de l’École Républicaine.
*2016-2017 : M2 Communication politique et institutionnelle à l’Université Paris 1 – Panthéon Sorbonne.
*janv.2016-août2017 : chargé de missions à la Mairie de Juvisy-sur-Orge (Essonne).
*nov.2017-déc.2022 : assistant parlementaire à l’Assemblée Nationale.
*déc.2019-juin2022 : conseiller politique du Groupe LR à l’Assemblée Nationale.
*mai2020-juil.2022 : Maire-adjoint de Renaison (Loire) en charge de l’attractivité, l’information municipale, aux relations avec les personnes âgées et la démocratie citoyenne.
*juil.2020-juil.2022 : 6ème Vice-Président de Roannais Agglomération (Loire) en charge du tourisme, de la gastronomie, de l’œnologie et des espaces naturels.
*depuis juin 2021 : conseiller départemental de la Loire (canton de Renaison).
*depuis juil.2021 : président du groupe majoritaire du Département de la Loire.
*depuis juin 2022 : député de la 5ème circonscription de la Loire.
-membre de la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire.
***
À quoi rêvait le petit Antoine lorsqu’il était enfant ?
« Je pense que je rêvais déjà de la politique. En tous les cas, j’étais très attentif à ce qui se passait. J’avais une vraie volonté de changer les choses et souvent été délégué de classe. Pas mal de choses classiques. Je rêvais aussi de fonder une famille.
« Mon père est éleveur laitier. J’ai vu pas mal de combats syndicaux à ses côtés. J’ai vu pas mal d’incompréhensions vis-à-vis de ce métier qui est très mal rémunéré face à une absence de réponse concrète des politiques. Ma mère travaillait à l’Hôpital de Roanne où elle était manipulatrice en radiologie. Elle est retraitée depuis. »
Comment est née votre rencontre avec la politique ?
« C’est une bonne question ! Mes premiers souvenirs politiques que j’ai, c’est 2002 ! J’avais 9 ans. Je me souviens de revoir sur l’écran de la télévision la tête de Jean-Marie Le Pen en voyant le désarroi, voire même l’inquiétude, de ma famille devant cette image. C’est mon premier souvenir politique.
« Pour autant, je ne sais pas vraiment comment il est né. Mes parents n’ont jamais été politisé, ni encarté. Certes, mon père était dans les mouvements agricoles mais il n’était pour autant syndiqué ni avait sa carte dans un parti. Je ne sais pas ce qui a fait que je m’y sois intéresser à un moment donné. C’est quelque chose de factorielle à chaque fois. »
Que retenez-vous de vos années d’étudiant à SciencesPo ?
« Les 2 premières années, sur le Campus de Dijon, ont été vraiment passionnantes parce que la moitié de la promotion était d’origine étrangère, sur un Campus d’Europe Centrale et Orientale. J’avoue que j’étais déjà pro-européen mais je connaissais peu cette partie-là de l’Europe. J’ai appris le Polonais. On a fait plusieurs voyages dans les Balkans aussi. Cela a été une ouverture vers cette partie-là de l’Europe qui est très mal connu ; qu’en fait tout le monde pense connaitre mais que personne ne connait. C’était vraiment très riche.
« Ensuite, à Paris, c’était à la fois la découverte de la Ville, de la Capitale, de la politique. C’est un peu à ce moment-là que je me rapproche de Michel Barnier. C’est plus cette combinaison de facteurs que les enseignements en eux-mêmes. »
Que retenez-vous de vos stages au Ministère de la Défense et chez Nextbankers ?
« C’est un choix de ma part. En 3ème année, l’on pouvait faire soit une année à l’étranger, soit une année en stage. J’ai donc choisi la 2ème option et je m’étais spécialisé sur une question : les partenariats publics-privés.
« J’ai fait 6 mois en Inde, dans une ONG qui déployait une micro-retraite au nom du Gouvernement, dans le cadre d’un partenariat public-privé. J’ai fait un audit sur ce programme-là. Mon rapport a d’ailleurs conduit à l’arrêt du programme.
« Ensuite, j’ai été au Ministère de la Défense, au sein du programme d’action qui avait mis en place Balard, notamment.
« Puis j’ai terminé chez Nextbankers, à Londres. C’était une startup qui visait à financer les campagnes électorales dans l’Europe, d’un point de vue démocratique, grâce au financement participatif, pour permettre à des candidats hors-partis d’être élu. Cette entreprise n’existe plus. Elle n’a pas résisté.
« Tout cela m’a permis de développer ce que l’on appelle la capacité d’adaptation. Quand vous avez 20 ans et que vous faites l’Inde – Paris – Londres en 12 mois… C’était déjà assez fort. Ce qui a aussi développé mon intérêt pour l’Inde. D’ailleurs, c’est le seul groupe d’amitié auquel je suis inscrit à l’Assemblée Nationale : le groupe d’amitié Franco-Indien. J’ai vraiment une attache très forte avec ce pays. J’y ai vécu dans une famille d’accueil pendant 6 mois. Depuis, j’y suis retourné déjà 6 fois. Je pense qu’il y a des choses à faire là-bas. Je pense qu’il y a aussi des choses à faire avec la France. C’est vraiment ce qui m’a marqué pendant cette année-là. »
Quelle expérience retenez-vous de votre rôle au sein de l’association « Touche pas à ma bourse, je la mérite » ?
« J’étais bénéficiaire de la Bourse au mérite. C’était une aide qui est attribué pour les boursiers sur critère sociaux qui ont eu la mention Très Bien au Baccalauréat.
« Le 24 juillet, en plein été, le Gouvernement décide de supprimer cette aide. Il y a eu plusieurs ministres, mais c’est Najat Vallaud-Belkacem qui portait le projet. Avec quelques étudiants ont s’est dit que déjà c’était difficile de mettre en place l’ascenseur social en France. Il est complétement bloqué. Il y a vraiment nécessité à résoudre cela. Tout le monde le dit. Mais dans les gestes, même les plus simples comme c’était le cas-là, on le supprime. On s’est retrouvé dans un groupe Facebook pour la soutenir. On a eu pas mal de couvertures PQR au mois d’août. Fin août, on est reçu par Florence Berthout, à la mairie du 5ème arrondissement, où l’on fait une Conférence de Presse, avec une dépêche AFP. Je fais plusieurs fois le JT de TF1 et France 2.
« On attaque au Conseil d’État la circulaire de la ministre. Je me retrouve au Conseil d’État, face au Ministère de l’Éducation Nationale, pour défendre cet aide. Il y avait une erreur manifeste dans la circulaire, qui a conduit à son annulation et au rétablissement de l’aide.
« Cela a été un moment fort pour moi parce que je me suis dit que c’était un peu David contre Goliath : des petits étudiants contre le Ministère de l’Éducation Nationale au sein d’une Institution supérieure. On pouvait vraiment faire changer les choses si l’on s’engageait en politique. Cela m’a vraiment convaincu que c’était vraiment cette voie-là qui m’était destinée.
« C’est aussi dans ce cadre-là que je rencontre Michel Barnier, qui était encore Commissaire européen. Je me rends à Bruxelles. Il me reçoit à la Commission. On lance une étude sur le système de bourse au niveau européen. »
Comment s’est passé votre passage sur les bancs de la Sorbonne ?
« Cela a été une belle année. C’est un choix de ma part, après avoir fini mon Master à SciencesPo. J’ai voulu me spécialiser en Communication politique et institutionnelle. La Sorbonne, c’est un univers qui est très universitaire, très tourné vers la recherche, donc assez pointu sur les enseignements.
« J’y ai retrouvé aussi l’ambiance des promos de Dijon parce que l’on était une trentaine, alors qu’en Master à SciencesPo Paris, on était plus de 300, voire 400. Ce qui ne donnait pas du tout la même ambiance. Tout ceci avec des parcours politiques disons très différents dans la promotion. On allait de l’extrême-gauche à l’extrême-droite mais ça tanguait beaucoup sur la gauche quand même. Ce qui est logique. C’est pour cela qu’en terme de débat, c’était vraiment enrichissant. Tout ce qui était là-dedans étaient passionnés de politique. Ce qui n’est pas d’ailleurs le cas à SciencesPo, d’ailleurs. »
Que retenez-vous de votre passage à la Communauté d’agglomération les Portes de l’Essonne comme chargé de mission du président puis à la Mairie de Juvisy-sur-Orge ? Comment s’est produit la rencontre avec M. Reda ?
« Je souhaitais faire mon Master 2 en alternance à SciencesPo. Ce qui m’intéressait c’était les collectivités locales et leurs fonctionnements. Dans le cadre de mon alternance, il fallait bien que je trouve un lieu où l’exercer. Je ne me souviens plus si j’ai postulé à une offre d’emploi ou si c’était une candidature spontanée. En tous cas, cela m’intéressait de travailler pour le plus jeune maire de France.
« Robin Reda m’a donc reçu avec son directeur de Cabinet. Ils ont accepté que je les rejoigne au sein de la Communauté d’agglomération les Portes de l’Essonne.
« Il est vrai qu’ensuite, avec la création du Grand Paris et la loi de 2016, la Communauté d’agglomération a été dissoute en intégrant la Métropole. Pour continuer mon apprentissage, j’ai donc continué à la Mairie de Juvisy-sur-Orge avec Robin Reda.
« On ne se connaissait pas du tout avec Robin. Cela s’est fait vraiment part mérite plus que par piston. Évidemment, il y avait le parcours qui est assez similaire. On a quand même travaillé ensuite plus de 2 ans ensemble. C’était formateur. J’avais envie d’être élu aussi donc cela m’a donné la possibilité de voir ce que c’était que d’être jeune élu. J’ai beaucoup appris auprès de lui sur ce côté-là. »
Comment avez-vous vécu votre rôle d’assistant parlementaire puis de conseiller politique au Groupe LR à l’Assemblée Nationale ?
« Je pense qu’être assistant parlementaire est l’un des rôles indispensables pour comprendre le fonctionnement de l’Assemblée Nationale. C’est une expérience qu’il ne faut pas trop prolonger non plus parce que sinon vous vous spécialisez dans un domaine et vous perdez peut-être un peu une forme d’enracinement et de connexion au réel. Encore plus pour les nouveaux assistants, c’est quand même-là que cela se passe politiquement.
« C’est un métier qui est très exigeant. Vous n’êtes jamais aux 35 heures ! [Rires] Vous travaillez énormément. Si vous êtes passionné de politique, que vous n’êtes pas dans la Majorité, que vous n’avez donc pas de place dans les Ministères… C’est tout de même-là que cela se passe. Plus que dans les partis politiques, en plus. Vu en plus l’état des partis politiques aujourd’hui, il y a, je pense, beaucoup plus d’influence à l’Assemblée National ou au Sénat que dans les sièges des partis politiques.
« Cela, c’est peut-être quelque chose qui a changé parce qu’en 2017, il y avait peut-être encore un peu d’influence dans les partis. Chose qu’en 2022 n’est plus le cas, en tous cas beaucoup plus faible, au sein des partis politiques. Un conseiller politique au Groupe a surement beaucoup plus d’influence aujourd’hui qu’un conseiller politique de parti.
« À l’époque, je ne sais pas. Mais aujourd’hui, comme il n’y a pas la majorité absolue, oui, clairement, je pense que mon successeur auprès d’Olivier Marleix a tout de même une marge de manœuvre qui est tout de même assez importante. Ce qui amène pas mal d’influence.
« Mais après, la vraie différence entre collaborateur de député et collaborateur de Groupe… Je m’occupais des relations avec la Presse. Forcément, lorsque vous passez au Groupe, le focus Presse est tout de même très orienté sur le président du Groupe plus que sur les députés. Il y a là un vrai changement sur toutes les rencontres avec la Presse, l’influence médiatique etc… »
Vous avez été Maire-adjoint de Renaison. Comment avez-vous vécu cette première expérience d’élu local ?
« Cela me manque aujourd’hui. Je trouve que c’est assez incroyable, quand vous habitez un petit village de 3’000 habitants, de pouvoir participer à son développement. En 2 ans, on a créé une voie verte. On a rénové une Gare, qui est devenu un restaurant. On a fait énormément de choses pour la Commune. Cela change le visage de tous les jours et du quotidien.
« C’est vrai que, je l’ai dit d’ailleurs aux agents, à Renaison, on peut changer la vie quotidienne et à Paris, on peut changer la vie de millions de Français. Ce n’est pas la même chose. À Paris, vous le faites en appuyant sur un bouton. Quand vous êtes Adjoint au maire, vous le faites en mettant la main dans le cambouis.
« Le travail ici est beaucoup plus cérébral, en quelque sorte, qu’en local. J’aime bien dire que dans « maire » il y a « aimer ». Ce sont les mêmes lettres. C’est tout de même très vrai. Je pense que les gens sont très attachés à leurs maires et/ou à leurs équipes municipales. C’est exigeant mais ils sont reconnaissants du travail qui est fourni. Ce qui n’est pas toujours le cas dans les autres mandats.
Comment avez-vous vécu votre passage à l’Agglomération Roannais ?
« J’ai été Vice-président au Tourisme. Renaison est un petit village. Là, j’étais Vice-président sur une agglomération de 40 Communes, 100’000 habitants. J’ai appliqué ma méthode d’élu à ce moment-là, c’est-à-dire que je suis allé voir toutes les Communes, tous les acteurs du tourisme en local. On a travaillé ensemble. On a développé des projets ensemble. On est maintenant sur des projets d’ampleur avec la création d’une route des vins, la création d’un espace VTT, la création d’un espace de randonnée. On l’a porté tous ensemble.
« Je vous donne un exemple. Ce week-end, je suis allé me balader, j’ai vu des panneaux de randonné et de VTT. Ce sont des choses qui sont très concrètes et très gratifiantes pour l’élu que vous êtes. Bien sûr, vous ne l’avez pas fait tout seul mais c’est vous qui l’avez impulsé et convaincu les acteurs, le président de l’agglomération etc… de financer ces projets. Ce qui laisse une marque très matérielle dans votre mandat.
« On a voté et obtenu la baisse des carburants. Qui se souviendra dans 5 ans qu’on l’avait fait ?! Vous voyez ce que je veux dire. Les 2 tâches sont très nobles et très utiles mais elles n’ont pas les mêmes conséquences matérielles. »
Autre expérience d’élu local : comment se passe votre expérience au Conseil Départementale de la Loire comme président du groupe majoritaire ?
« C’est une fonction bénévole liée à mon mandat de conseiller départementale.
« Ce qui est très intéressant c’est que l’on a une majorité qui est très élargie. 36 conseillers départementaux sur 42. Il faut arriver à concilier tout le monde pour que l’on arrive à porter la politique départementale.
« Le mandat de conseiller départemental est spécifique parce que ce n’est pas un mandat de liste. Vous avez 36 élus qui ont été élus sur leurs noms et qui n’ont pas été élus sur une liste. Il faut arriver à échanger avec chacun, mettre tout le monde d’accord. Un peu d’ailleurs comme le président de Groupe à l’Assemblée Nationale, en beaucoup plus petit. C’est un vrai travail de concertation.
« C’est intéressant, à 29 ans, d’être le président de tous les conseillers départementaux qui sont là parfois depuis des années et d’avoir leurs confiances. Cela est un acte politique fort aussi pour eux, de leurs parts. »
Quel regard porte-vous sur la campagne présidentielle de 2022 ?
« Je l’ai très mal vécu. En tant que citoyen parce que j’ai considéré qu’il n’y avait pas de débat.
« Finalement, vous voyez, mon premier souvenir politique de 2002, certes c’est Jean-Marie Le Pen mais aussi le fait qu’il y a eu une campagne électorale. Celle de 2007, je l’ai vécue avec passion parce qu’il y avait Nicolas Sarkozy qui était là. Il y a eu une campagne électorale face à Ségolène Royal. Celle de 2012, la même chose face à François Hollande. Est-ce qu’il y aura des gens qui ont trouvé une vocation politique avec celle de 2022 ? Je n’en suis pas si certain du tout.
« J’ai très mal vécu le Zénith de Valérie Pécresse. D’une manière générale, je pense qu’elle a payé et on a payé notre incapacité à trouver de nouvelles idées. À travailler sur le fond. À déplorer le fait que l’on n’est pas audible dans les médias mais pour autant ne pas arriver à renouveler le logiciel. Quelles nouvelles idées a-t-on portées depuis 2007 ?
« Je vous donne un exemple, un sujet qui me tient à cœur c’est l’écologie. Lorsque vous parlez à des gens de droite sur ce sujet, ils vous disent : « NON aux éoliennes, OUI au nucléaire ! » Quand vous avez 29 ans et que vous êtes engagé en politique pour changer la vie des gens et préparer l’avenir. C’est un peu short comme discours climatique sur la biodiversité et tous les autres angles de l’écologie.
« Là, il y a vraiment matière à ce que l’on travaille de nouveau et que l’on arrive vraiment à faire émerger de nouvelles propositions. En prenant des risques ! Mais c’est aussi comme cela que l’on arrive à gagner. »
Vous avez été élu député de la 5ème circonscription de la Loire en juin. Comment avez-vous vécu ce moment ?
« Première chose : tout le monde m’avait dit que c’était impossible.
« C’est l’une des rares circonscriptions En Marche ! que la droite a reprise en 2022. J’étais très inquiet avant le 1er Tour, puisque le vrai sujet pour moi était de savoir si on passait le cap ou pas.
« Après, le soir du 2nd Tour, j’étais dans un petit appartement à Roanne. Les maires envoyaient leurs résultats. J’ai été majoritaire dans toutes les Communes sauf une où j’étais à égalité. C’était gagné, on avait 9’000 voix d’avance, mais je tenais à fêter la victoire que lorsque j’ai reçu les résultats de la dernière petite Commune rurale. C’était vraiment important pour moi. Je viens du monde rural. Ce n’est pas parce que dans un village il y a 300 habitants, que cela a moins d’influence qu’une ville où il y a 15’000 ou 30’000 habitants.
« Une fois que j’ai été élu, cela a été un moment incroyable pour moi. J’étais en famille, avec ma suppléante et des militants très proches. Ensuite, l’on est allé rejoindre tout le monde à la permanence. On a fait la fête le soir dans un caveau du Roannais, en tant que Vice-président au Tourisme. Le lendemain, j’étais dans le bureau de la Préfète, je recevais mes codes pour l’Assemblée Nationale. Le surlendemain, j’étais ici avec ma suppléante.
« J’ai vraiment vécu le poids sur mes épaules lorsque je me suis installé dans l’Hémicycle parce que c’est le seul endroit qui est quasiment inaccessible aux collaborateurs. C’est vraiment à ce moment-là où je me suis rendu compte de ce qui se passait. Je pense que les députés qui n’ont jamais été collaborateur sont frappés par les lieux. Pour ma part, c’est vraiment l’Hémicycle qui a fait que le poids des responsabilités m’est tombé dessus. Il ne faut pas avoir peur de le dire. C’est aussi un sentiment de crainte en se demandant : « est-ce que je vais être à la hauteur ? »
« C’est aussi cela qui a interpellé dans la campagne. Je disais aux gens : « J’ai 29 ans. Je ne sais pas tout sur tout ! » Le fait que vous ayez des élus qui sont plus âgés et qui donnent l’impression de tout savoir sur la vie et de vous comprendre au moindre regard. Pour ma part, mon engagement c’est aussi de me laisser la capacité de douter parfois et de dire : « laissez-moi plus de temps, j’ai besoin de réfléchir sur ce sujet-là, parce que je n’ai pas encore d’avis sur la question. » Ce qui est humble de le dire. Les élus ne sont pas omniscients.
« On commence aussi par l’élection de la présidence. Comme je m’appelle Vermorel, j’étais à l’extrême-gauche de l’Hémicycle. À côté de moi, c’était Olivier Véran, qui était sur le banc des ministres, et non assis en tant que député.
« C’était assez cocasse de me retrouver dans cette partie-là de l’Hémicycle. Ce qui se reproduira peut-être la prochaine fois, si je suis réélu, mais politiquement probablement jamais. C’était assez étonnant d’être sur ces bancs-là. »
Quel regard portez-vous sur votre expérience et votre rôle de député ?
« C’est à la fois passionnant et éreintant.
« Passionnant parce que comme le président de la République n’a pas la majorité, il est tout de même obligé d’écouter les députés de l’opposition. On a un rôle pivot en la matière. C’est vraiment instructif.
« C’est éreintant parce qu’il y a des députés qui ne sont pas là pour changer les choses mais pour les bloquer. Ils nous font perdre énormément de temps. Ils rendent le système démocratique complétement immature. Je trouve que l’on a un système qui est suranné. Quand on voit que l’on perd des heures et des heures dans des débats sur des sujets qui n’ont pas d’intérêts.
« Durant le Discours de Politique Générale, certains hurlaient tellement pendant le prononcé par la Première ministre, que je n’entendais rien. Certes, je suis au dernier rang. Mais tout de même ! C’est un minimum de respect à avoir envers l’Institution. Je le connaissais mais ce n’est pas la même chose que de le voir à la télévision que de le vivre en vrai. Quand on le voit en vrai, franchement cela ne donne même comme un sentiment de honte de participer à ce genre de chose parce que ce n’est pas cela la démocratie. La Première ministre lit son discours, on n’a pas de distribution du discours. À la télévision, cela ne s’entend pas puisque l’on augmente le son du micro, le reste n’est pas enregistré. Mais nous, quand on est au milieu… Certains hurlent tellement fort que l’on n’entend pas le speaker.
« C’est là où je me disais que s’il se passait la même chose lors du conseil municipal de Renaison. S’il on n’entendait pas le maire. Les Gendarmes seraient là pour les sortir, les conseillers municipaux qui font du bruit. Tout cela m’a un peu marqué.
« En revanche, je trouve qu’il y a de l’utilité. Comme il n’y a pas vraiment de majorité absolue, il y a vraiment une utilité renforcée de la part de l’opposition. Encore une fois, c’est une opposition responsable qui est capable de voter ce qui va dans le bon sens, de ne pas voter ce qui va dans l’autre. C’est passionnant et cela l’est tous les jours. Cela nous force à réfléchir sur comment vous envisagez votre mandat ? Comment vous le portez ? etc… »
Quel rapport avez-vous avec les réseaux sociaux ?
« Cela va peut-être paraitre bizarre ce que je vais vous dire.
« Remarque, ce n’est pas forcément bizarre. Ce n’est pas parce que je suis jeune que je suis forcément un adepte des réseaux sociaux. Je considère que Twitter a fait beaucoup de mal à la vie politique. On a une tendance générale à être intéressé par un président de la République qui fait du jet ski ou par une Première ministre qui boit un peu trop, que par les débats de fonds.
« Je suis un peu nostalgique des débats qu’ont pu avoir nos prédécesseurs sur le fond et qui était pallié par l’écume des choses et ce quotidien qui fait peut-être de l’audience mais qui ne laisse rien derrière lui.
« Je sais qu’à la fois c’est une nécessité en tant qu’élu d’être sur Twitter et de se faire connaitre là-dessus. Pour autant, je suis très mal à l’aise avec cela parce que la petite réaction, la petite phrase, c’est peut-être ce qui fait politiquement et médiatiquement mais est-ce que c’est ce qui est vraiment l’intérêt de votre mandat ?! Je suis un petit peu sceptique de cela.
« Ce qui est marrant c’est que j’ai tout de même un petit peu le sentiment que c’est un sentiment qui est plus fort dans les nouvelles générations que dans la génération juste au-dessus. C’est comme dans un repas de famille où les jeunes laissent leurs portables de côté et les parents l’ont encore tout le temps à table. Ceci parce qu’ils n’ont jamais été éduqué à mettre de côté le numérique et à se déconnecter. J’espère qu’il y aura une évolution sur le sujet mais pour l’instant, je n’en suis pas certain. Cela participe à l’appauvrissement et à la défiance vis-à-vis de la vie politique. »
***
Merci à M. Vermorel-Marques pour sa bienveillance et sa participation.
Merci à M. Andréa Orlando pour son aide précieuse à la réalisation du portrait.
Un avis sur « M. Antoine Vermorel-Marques »