M. Frédéric Vallois

Herr com’ politique / com’ privée : portrait.

Chers lecteurs,

Me revoilà sur le chemin de la rencontre et de l’écriture.

Je vous fais part d’un entretien que j’ai eu avec Frédéric Vallois, le jeudi 17 janvier 2019, dans un café parisien.

Gazouilleurs, vous voilà récompensé avec cet échange nourri avec le directeur de la communication interne et éditoriale d’un grand groupe de médias : VIVENDI.

Histoire de garder ma trame éditoriale, je vous propose de découvrir le parcours de communicant, qui est passé aussi bien par le secteur public que privé. Un vrai apprentissage et une expérience de vie pour comprendre le parcours qui est le sien.

Voici pour vous l’échange que j’ai pu avoir avec lui.

Bonne lecture !

@romainbgb – 08/02/19

 

Vallois Frederic - 003 - Brute
Frédéric VALLOIS – © Manuel Braun – Droits Réservés

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Bio Express

16 janvier 1982 : Naissance à Anthony (Hauts-de-Seine).

1997-2000 : Lycée franco-allemand de Buc (Yvelines).

Obtention du double Baccalauréat franco-allemand série Littéraire mention Bien.

2002-2007 : Sciences Po Paris.

Master Affaires Publiques – diplôme bilingue franco-allemand.

2004-2005 : Stage au service de Presse de l’Ambassade de France à Berlin.

Janvier – Mai 2007 : Stagiaire aux relations internationales au sein des équipes du        candidat Nicolas Sarkozy durant la campagne présidentielle.

2007-2010 : Consultant Senior chez DELOITTE.

2010-2012 : Conseiller ministériel au Porte-Parolat du Gouvernement (Luc Chatel,        François Baroin et Valérie Pécresse).

2012-2018 : Conseiller communication et discours du Directoire de VIVENDI.

Depuis oct. 2018 : Directeur de la communication interne et éditoriale de VIVENDI.

* * *

Enfance :

« Je suis né à Anthony dans les Hauts-de-Seine et j’ai passé toute ma jeunesse à Massy dans l’Essonne. Je suis donc banlieusard et fier de l’être. Après mes années collège à Massy, je suis parti dans un lycée franco-allemand près de Versailles, à Buc. Un autre type de banlieue… [Rires] » 

Un lien familial avec l’Allemagne ?

« Aucun, du moins parmi mes proches. Mais j’ai eu la chance d’avoir un professeur d’allemand extraordinaire au collège. Il y a des profs qui vous marquent à jamais, dans le bon sens du terme. Si je ne devais en citer qu’un, ce serait lui : Monsieur Morin !

« Il pouvait être très dur mais poussait ses élèves à donner le meilleur d’eux-mêmes. C’était un passionné et il m’a transmis cette énergie. Vu que j’aimais l’allemand, il m’a proposé en fin de troisième de postuler dans un lycée franco-allemand. L’entrée se faisait sur concours : j’ai raté mon épreuve de maths mais réussi celle d’allemand. Direction Buc ! »

1997-2000 : Bac Littéraire au Lycée franco-allemand de Buc.

« Trois années fabuleuses où j’avais grosso modo la moitié des cours en français, l’autre moitié en allemand. J’ai appris à dire « hypoténuse » ou « conscience du néant » en allemand, mais ne me demandez pas de m’en souvenir [Rires] ! En 2000, j’ai passé mon Bac L : facile pour s’en souvenir avec le passage au nouveau millénaire. Un « Abi-Bac », en réalité, reconnu en France comme en Allemagne.

« Plus tard, dans le cadre de Sciences Po, j’ai eu la chance de passer du temps à Mannheim (près de Francfort) et à Berlin. Je pratique moins l’allemand aujourd’hui mais j’en garde un très bon souvenir. C’est plutôt l’anglais au quotidien d’ailleurs, vu les activités de mon entreprise actuelle. Mais l’allemand a été une porte d’entrée pour moi. » 

2002-2007 : Sciences Po Paris

« Une belle aventure ! C’est très vite devenu un objectif après le Bac. D’où le choix d’une prépa littéraire qui préparait également au concours d’entrée à Sciences Po Paris. C’était l’époque où on pouvait entrer à Bac +1… Je repense à l’immense hall de la Porte de Versailles dans lequel se déroulaient les épreuves. C’était effrayant.

« Après un an rue Saint-Guillaume, je suis rentré de mon année à l’étranger avec en tête l’idée de passer les concours de la fonction publique. Rien de très original… Mais j’aimais la chose publique, la politique et l’écriture. Trois choses que le Master Affaires Publiques offrait. A Sciences Po, on t’apprend bien sûr à bien écrire, à bien t’exprimer et à penser de manière synthétique. Mais surtout on te donne une grille de lecture pour comprendre le monde qui t’entoure.

« Généralement, après deux années de Master Affaires Publiques, tu poursuis avec ce que l’on appelle une Prep’ ENA pour peaufiner ta préparation aux concours. Elle ne prépare à L’ENA mais aussi aux concours du Quai d’Orsay, des Collectivités Territoriales, de l’Assemblée, du Sénat… L’ENA, ça a été vite vu : je n’ai même pas été admissible. »

Concours du Quai d’Orsay :

« C’était en 2007. Je m’étais découvert un intérêt pour les questions diplomatiques après mon stage à l’Ambassade de France en Allemagne. Et puis je pensais pouvoir tirer parti de mon niveau en allemand, considéré en plus comme une langue « rare » dans les concours du Quai. Résultat : une immense désillusion puisque j’ai été admissible mais recalé à l’oral… à cause de ma note en allemand !

« Plusieurs raisons à cela : le texte était difficile, les examinateurs odieux et moi en petite forme… J’ai eu 9. Avec un coefficient 8 ou 9, ça ne pardonne pas. Une dizaine d’années après, j’y repense en souriant, mais sur le moment ça a été une vraie claque. » 

Une remise en question après Sciences Po ?

« Je sors de Sciences Po sans aucun concours en poche. Mais j’avais le diplôme. Il y avait alors deux possibilités : retenter les concours, ce que j’ai vite exclu ; ou se lancer dans la vie active là où on voudrait de moi.

« Il y a eu entretemps un élément déterminant pour la suite : j’ai eu la chance de participer comme stagiaire à la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy de janvier à mai 2007, au service des questions européennes et internationales. » 

Janvier à mai 2007 : campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy.

« Franchement, c’était une campagne de dingue. Elle est d’ailleurs toujours considérée comme un modèle du genre. Le renouvellement qu’incarnait Nicolas Sarkozy à cette époque était très puissant. A ma modeste place de stagiaire, je le ressentais. Je me souviens d’affiches placardées dans les locaux rue de Miromesnil sur lesquelles était écrit quelque chose comme : « Aujourd’hui, on est à fond et demain on accélère ».

Après l’élection de Nicolas Sarkozy, mon chef l’a suivi à l’Elysée au pôle communication pour l’international. Il m’a dit : « Il y a beaucoup de demande dans les cabinets, tout est pris. Fais autre chose et je te recontacterai si jamais ça bouge. » » 

Septembre 2007 – juin 2010 : DELOITTE

« J’ai fait du conseil en secteur public chez Deloitte pendant près de trois ans. Une bonne expérience à nouveau, qui m’a permis d’avoir un pied dans le privé tout en conservant un lien avec le public. J’ai fait des missions variées pour le ministère de la Défense, la Commission européenne, des collectivités territoriales… Le conseil, c’est une bonne école où on t’apprend à être tout-terrain et t’adapter à différents clients ».  

Juillet 2010 – mai 2012 : entre au Porte-Parolat du Gouvernement.

« Mon ancien boss pendant la campagne me passe un coup de fil au printemps 2010 et me dit : « Ça va bouger au Porte-Parolat du Gouvernement [à l’époque, Luc Chatel.] Il va renouveler une partie de son cabinet. Est-ce que ça t’intéresse de postuler ? » Je dis oui immédiatement et entre dans le processus de recrutement.

« Et là, mon premier entretien, avec le conseiller en charge du Porte-Parolat, se passe mal. Du moins, c’est l’impression que j’en ai. Il n’est pas agréable et me pose des questions ultra pointues sur la politique économique et fiscale du Gouvernement. Je sors de là dépité, persuadé que tout s’arrêterait là. Bizarrement, on me rappelle quelques jours plus tard, en me disant que ce premier contact était très positif ! Les rendez-vous s’enchainent avec le chef de Cabinet et le directeur de Cabinet. Et se concluent positivement.

« Juillet 2010, c’est parti ! L’aventure ministérielle commence en tant que conseiller technique en charge des éléments de langage sur les questions économiques et budgétaires. Quand tu entres dans un cabinet ministériel, tout change : le niveau d’exigence, le rythme, le niveau de stress… Tu passes un cap très rapidement. On était quatre à avoir chacun un pôle de prédilection (régalien, social, économie et divers). On bossait 12h à 15h par jour ensemble, j’ai tissé des liens incroyables avec mes collègues qui sont depuis devenus des potes.

« Novembre 2010, tout s’effondre ! Remaniement. François Baroin devient Porte-Parole du Gouvernement à la place de Luc Chatel. Les heures et les jours qui suivent, tu ne sais pas bien ce que tu vas devenir. Le nouveau ministre qui arrive avec ses propres conseillers va-t-il te (re)prendre ? Il a fallu à nouveau passer des entretiens pour rejoindre les équipes de François Baroin. Et il s’est passé la même chose en juin 2011 lorsque le Porte-Parolat est passé dans les mains de Valérie Pécresse à l’issue d’un nouveau remaniement.

« Pendant ces deux années, et surtout en 2011-2012, on a connu la crise de la zone euro. C’était l’époque où la France était chahutée par les agences de notation. C’était le moment où la Grèce était au fond du trou. L’Italie et l’Espagne menaçaient aussi de faire défaut et de sortir de la zone euro. Je m’en souviens comme d’une période de très grande tension. D’un point de vue rédactionnel, il fallait faire très attention et trouver les mots justes. Une phrase de travers du Porte-Parole et ça pouvait affoler les marchés. Jamais -et c’est heureux en un sens-, je ne revivrai de tels moments dans ma vie professionnelle.

« Les trois ministres pour lesquels j’ai eu la chance de travailler, avec leurs qualités et leurs défauts, ont tous été très humains et bienveillants. Le monde des cabinets peut être dur mais on y croise des personnes extrêmement talentueuses. Et on est souvent bien loin des représentations fantasmées que véhiculent films et séries politiques sur le sujet ».

Septembre 2012 : Vivendi.

« Retour à la case privée, si je peux dire. Au départ, je visais des entreprises publiques ou parapubliques. Un jour, je passe un entretien chez Alstom avec le directeur des Affaires publiques, qui finit par me dire : « Il n’y a rien chez nous mais je crois qu’ils cherchent quelqu’un chez Vivendi. Va voir le secrétaire général du groupe de ma part. »  C’était en juin 2012. Chez Vivendi, je rencontre le secrétaire général, le directeur de la communication, le DRH… Puis pars en vacances durant tout l’été 2012, en remettant à la rentrée la suite du recrutement.

« Fin août, après des vacances qui m’avaient tenu loin de l’actualité, je m’aperçois que le secrétaire général était devenu entre-temps président du Directoire ! Un gros changement de gouvernance avait eu lieu pendant l’été. Ça aurait pu stopper le processus d’embauche mais il a continué comme si rien ne s’était passé. »

« Je me suis donc retrouvé chez Vivendi un peu par hasard. Le job de « plume » auprès du Directoire qu’on m’a proposé était une création de poste. L’avantage, c’est qu’il est très transversal et qu’il est au carrefour de l’information dont on a besoin pour écrire. Je suis rattaché à la communication mais travaille « à la carte », pour toute demande de rédaction émanant du Directoire ou des Directeurs. Ça se passe si bien que ça fait six ans que je le fais… Et puis, Vivendi c’est quand même l’une des boites les plus sexy du CAC 40 avec la musique, l’audiovisuel, les jeux vidéo, la publicité et, depuis peu, les livres. » 

Travail de plume chez Vivendi :

« Il existe des plumes en politique, il en existe aussi en entreprise ! La différence, c’est qu’elles sont moins visibles et donc moins reconnues. Au contraire de la politique où le discours est roi, la plume en entreprise écrit dans des formats plus variés : rapport annuel, plaquettes de présentation, newsletters, notes en tous genres…

« Le discours reste malgré tout celui que je préfère. Pour une raison simple : c’est un matériau vivant. Tu écris pour quelqu’un d’autre, tu « prêtes » ta plume en quelque sorte. Et tu ne le fais pas pour que ce soit lu, mais dit. Il faut donc coller à la personnalité de celui qui prononce le discours. C’est comme au théâtre : la performance dépend autant de l’orateur que du texte lui-même ! A l’inverse, il faut aussi se mettre à la place des gens qui vont l’écouter. On n’utilise pas les mêmes mots ni le même ton selon qu’on s’adresse à des salariés, à des journalistes ou à des analystes financiers. »

Octobre 2018 : directeur communication interne/éditoriale chez Vivendi

« On m’a confié il y a quelques mois la communication interne du groupe, avec comme objectif d’accompagner la transformation de Vivendi d’une holding financière en un groupe intégré. C’est une nouvelle aventure passionnante, complémentaire du métier de plume. Un exercice comme le discours/message de vœux réunit les deux ! Mais la communication interne, c’est aussi de l’évènementiel, du management d’équipe, des réseaux internes… »

Quel est ton rapport avec le numérique et les réseaux sociaux ?

« Je suis très réseaux sociaux même si j’essaie d’en modérer l’usage. En tant que plume, j’aime beaucoup Twitter qui oblige à soigner les mots vu la contrainte d’espace. Quand tu es communicant aujourd’hui, il est de toute façon difficile de faire l’impasse sur ce type d’outils.

« Le plus compliqué en fait, c’est la gestion du pro et du perso. Quand je tweete sur le PSG ou Federer, ça ne prête pas à conséquence. Mais quid d’un sujet politique ou social ? Est-ce que je parle en mon nom ou au nom de Vivendi ? Une prise de position maladroite ou mal calibrée est vite inflammable. C’est un équilibre à trouver. Il faut faire preuve de discernement, de pondération et, bien sûr, d’un élémentaire devoir de réserve sur certains sujets. Ou alors il faudrait créer deux comptes distincts mais la schizophrénie a ses limites ! Et puis un compte, c’est déjà long à alimenter…

« Par ailleurs, ça m’arrive parfois d’écrire des papiers sur la communication politique au titre de mes anciennes fonctions de conseiller ministériel. A aucun moment bien entendu, Vivendi n’est mentionné. L’avantage de l’écrit, c’est de pouvoir maitriser le format et le sujet. Une intervention dans une émission politique est beaucoup plus risquée car tu peux te retrouver juge et partie. Surtout quand tu bosses pour une entreprise de médias… Bref, il faut savoir rester sur la ligne de crête. Et comme me l’a dit plusieurs fois le Dircom de Vivendi : agis sur Twitter comme dans la vraie vie… En faisant preuve de bon sens ! »

* * * 

*Un grand merci à Frédéric Vallois pour son écoute, sa disponibilité et sa réactivité.

*Merci à lui d’avoir accepté cet entretien.

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