M. Jean Hingray

Une figure Vosgienne.

Chers Lecteurs,

Je vous invite à arpenter cette fois-ci les couloirs d’un Hémicycle national pourtant bien méconnu de la plupart de nos concitoyens : Le Sénat.

Université de Lorraine. Ce sont des études en Droit public et en Management public qui permettront à notre interrogé de poser les bases de son éducation universitaire. La spécialisation sur les Collectivités Territoriales sera l’amorce qui permettra de donner une suite à son parcours professionnel.

UNI. Tous comme notre précédent interrogé, ce syndicat étudiant permettra à notre personnalité de se former un parcours militant.

Club Démocratique des Vosges. Le terroir n’est jamais loin. En octobre 2012, notre personnalité créera ce Club sur son nom propre afin de lancer un mouvement sur son nom propre. Le début de l’aventure électorale comme ici.

Remiremont. Après une aventure électorale sans succès, l’élection municipale partielle de 2016 sera la bonne. Notre interrogé devient le nouveau maire de la Cité Vosgienne.

Vosges Méridionales. Dans la continuité de ses aventures électorales, notre interrogé est réélu à 100% des voies au premier tour dans sa Commune. Ce qui lui permettra, après un combat certain, de devenir le président (éphémère) de la Communauté de Communes de Porte des Vosges Méridionales.

Sénateur. L’aventure électorale continue. Élu à l’âge de 34 ans en septembre dernier, notre interrogé fait son entrée dans cette Haute Assemblée, devenant l’un des dix plus jeunes membres de la Législature de cette Haute Assemblée.

 

Je vous laisse découvrir le portrait de Monsieur Jean Hingray, sénateur des Vosges.

M. Jean Hingray, sénateur des Vosges. ©droits réservés

Dans le cadre pandémique que nous connaissons, la réalisation de ce portrait a été réalisé, dans les conditions sanitaires requises, au sein du Sénat, le 22 septembre 2021.

 

Bonne lecture !

@romainbgb – 27/09/21

 

***

Biographie Express de M. Jean HINGRAY :

*1986 : naissance à Nancy (Lorraine).

*2004 : Obtention du Baccalauréat série Économique et Scientifique.

*2009 : diplôme de Master en droit public et management public à l’Université de Lorraine.

*2012 : fonde le Club Démocratique des Vosges.

*nov.2016 – oct.2020 : maire de Remiremont (Vosges).

-président du Conseil de Surveillance de l’Hôpital de Remiremont (Vosges).

*juillet-oct.2020 : président de la Communauté de Communes de Porte des Vosges Méridionales.

*depuis sept.2020 : sénateur des Vosges.

-membre du Groupe Union Centriste au Sénat.

-membre de la Commission de la Culture, de l’Éducation et de la Communication.

*depuis oct.2020 : conseiller municipal de Remiremont (Vosges).

-conseiller communautaire de la Communauté de Communes de Portes des Vosges Méridionales.

*2021 : président de la mission d’information en faveur de l’égalité des chances et de l’émancipation de la jeunesse.

-manager du Club des Mécènes de la Fondation du Patrimoine des Vosges.

***

 

A quoi rêvait le petit Jean lorsqu’il était enfant ?

« C’est une bonne question ! La politique, non, cela est sûr.

« Il y a quelque chose qui est sûr, c’est que j’adore le Football, mais je n’ai jamais eu un bon niveau. L’idée de jouer pour l’Olympique de Marseille. Mon père est Vosgien et ma mère est de Marseille. Je suis fan de Football et que de Marseille, avec l’Équipe de France, naturellement. C’est quelque chose qui aurait pu… Mais même pas car je n’ai pas de grosses qualités footballistiques, comme en peuvent témoigner mes amis. [Rires] Il y avait cela.

« Sinon, « d’être heureux », d’être avec mes amis, d’être avec ma famille. Le fait de partager le bonheur avec les gens que j’aime, tout simplement. Je n’avais pas de rêve particulier.

« J’avais eu cette question récemment sur Public Sénat, dans l’émission Sénat Stream, où l’on m’avait demandé : « Qu’est-ce que vous rêveriez de faire ? » Finalement j’avais dit qu’avec le temps, politiquement, j’avais toujours dit que si je réussi, je serais sénateur. C’est quelque chose qui m’a toujours plu. On avait la figure tutélaire du Président Poncelet à Remiremont, dans les Vosges. En boutade, à la question du jeune journaliste, j’avais répondu : président de l’Olympique de Marseille, parce que c’est une de mes passions.

« Être heureux et passionné par ce que je fais. Tout simplement. Comme beaucoup de Français je pense, d’ailleurs. »

Quel souvenir gardez-vous de vos années étudiantes ?

« C’est ce moment-là où j’ai commencé vraiment la politique. Lorsque j’étais au Collège et au Lycée, c’était mes copains qui m’avaient choisi pour être délégué de classe et au conseil d’administration. Ce n’est pas moi qui avais voulu y aller. [Rires] Il n’y a qu’à l’Université où j’ai souhaité m’engager. Ce que j’ai fait en rejoignant le syndicat étudiant UNI. D’ailleurs avec Anne-Laure Blin, qui est députée aujourd’hui. J’en garde comme souvenir, bien sûr, les soirées, les amis.

« Dans mon parcours universitaire ce qui m’a aidé c’est justement le fait de faire de la politique. J’ai fait mes études avec un cursus honorable, avec Droit public, Management public. Ceci avec une spécialisation dans les Collectivités territoriales parce que c’est ce qui me plaisait de faire. « Servir » un territoire et servir mon territoire en tant qu’agent d’une collectivité. C’est la politique qui m’a permis de passer la 1ère et la 2ème. Je ne voyais pas beaucoup d’intérêt dans la plupart des matières. Finalement, je m’éclatais dans la politique. L’UNI est arrivé à ce moment-là. C’est ce qui m’a permis d’avancer, d’égrainer, de vouloir faire des choses.

« C’est ce qui m’a marqué dans mes années universitaires. Les choses classiques d’étudiants. »

Comment s’est créé votre parcours militant ?

« Comme je vous le disais, j’ai commencé à l’UNI avec Anne-Laure Blin qui m’a « débauché » lors d’une soirée entre amis.

« C’était au même moment de l’envahissement des Facs par une très petite minorité. Ensuite, ce qui m’agace, c’est d’être bloqué par une minorité qui veut avoir raison, alors qu’il ne représente qu’un pourcentage infime de la population étudiante. Après, je suis plus que respectueux, mes homologues de l’UNEF s’en souviennent, des idées politiques. La seule chose c’est que je n’aime pas l’anarchie. J’aime l’ordre et la rigueur. C’est quelque chose qui m’a toujours fait avancer.

« C’est là où je me suis engagé, dans une vision de l’UNI très large. Dans ma section il y avait énormément de centriste. Même des copains socialistes qui venaient m’aider, plus par amitié, naturellement, que par conviction politique. [Rires]

« C’était quelque chose de large où j’ai fait énormément de débats, de rencontre, avec des petits déjeuners avec des chefs d’entreprises ou aussi des tournois de Football caritatifs. Des soirées étudiantes pour financer nos campagnes électorales. On avait fait aussi, avec mon amie Hélène Rossinot, une manifestation en pyjama dans l’Université pour le prolongement des horaires d’ouverture de la BU. Ce qui avait fait grand bruit nationalement avec des articles de Presse dans Le Figaro et Le Monde.

« Il y a eu d’autres choses aussi qui m’ont mobilisé, c’est sur le Handicap. C’est un moment comme celui que l’on vit en ce moment ensemble. On est allé boire un verre avec un copain de Master, Kamel. Il a mis 12 minutes pour partir de la salle de classe jusqu’à la Cafète. Alors que nous, en général, on mettait 3 minutes. C’est là où je me dis que ce n’est tout de même pas normal qu’à Nancy, Cours Léopold, dans une Université où il y a tout de même un peu de moyen, que les personnes à mobilité réduite mettent autant de temps pour aller boire un café avec les copains de la promo. C’est quelque chose qui m’a suivi dans mon parcours, en tant que maire etc… J’ai toujours essayé de faire quelque chose pour les personnes à mobilité réduite, même si cela a un coût pour la Collectivité. »

En 2012 vous créez le Club Démocratiques des Vosges. Comment est né ce projet ?

« C’est dans la même logique que l’UNI, finalement. En discutant avec vous, cela me permet de faire un peu d’introspection. C’est la même logique qu’est l’UNI. C’est-à-dire qu’il y a des valeurs sur lequel je ne transige pas : la liberté, la responsabilité, la rigueur collective. Il y a bien d’autres choses, naturellement.

« Je le disais encore tout à l’heure avec vous avant l’interview, mais il y a surtout un problème de mentalité et un manque d’ouverture dans les partis politiques traditionnels c’est-à-dire que l’on est trop sclérosé. D’ailleurs cela se voit dans le nombre d’adhérents des partis politiques. Quand tu es adhérent, tu n’es bon qu’à coller des affiches et distribuer des tracts. Tu ne travailles pas tes idées. Surtout, il ne faut pas en avoir car tu pourrais déranger le mec qui est en place. Il faut, la plupart du temps, ne pas bouger. Puisque dès que tu es jeune et que tu commences à bouger, tu te fais massacrer après. Ce qui m’est arrivé mais c’est arrivé à tant d’autres.

« Vous voyez le problème qui a lieu en ce moment avec la primaire. Cela est caractéristique. On est passé de rien, à tout. Je ne sais pas ce que sera le résultat de la décision du vote chez Les Républicains sur leur primaire. Mais pour ma part, une primaire ouverte ce n’est pas bon. Pourquoi cela n’est pas bon ? Parce que les adhérents d’un parti politique sont focalisés sur l’élection présidentielle. C’est quelque chose de flagrant sous la Cinquième République. Sauf que l’on a omis quelque chose dans ce pays : il n’y a pas que le président de la République.

« Alors, oui, je le dis souvent, il y a dans ce pays deux personnes. C’est le maire et le président de la République. On vient te voir, quand tu es maire, pour tout et pour rien. Lorsque tu es président de la République, tu es responsable de tout. Ce sont les deux figures.

« Je reviens sur mes partis politiques. Si tu n’as pas de primaire dans les partis politiques, c’est parce qu’il y a un vrai souci de fond. C’est qu’il faudrait des primaires pour désigner les candidats dans les grandes villes ; pour désigner les candidats aux départementales, aux régionales, aux législatives et aux sénatoriales. Naturellement aux élections présidentielles mais en primaire fermée. À partir de là, il y aurait tout de même des gens qui viendraient. Tu aurais envie. Même si ce n’est que ponctuel. Justement, c’est aux partis politiques de fidéliser les personnes qui viennent de manières ponctuelles par des formations, par des débats d’idées. Le problème est qu’il y a un appauvrissement dans les partis politiques qui est flagrant. Il ne se passe jamais rien et en plus tu n’y apprends rien. C’est cela qui est dramatique.

« Ce qui me ramène à mon idée du Club Démocratique des Vosges. Je reviens là-dessus. C’est-à-dire qu’à travers des débats, des formations, des rencontres… Et des moments aussi un peu originaux parce que l’on ne peut pas concilier les personnes avec la politique qu’à partir que de la politique. Mon tournoi de Football caritatif, les cours de cuisines avec des Chefs étoilés…Vous voyez, des choses assez originales.

« Je ne dis pas que c’est la bonne formule mais cela permet quand même d’arriver à harmoniser les personnes là-dessus et d’attirer les personnes vers la politique. Ce qui n’est pas le cas en ce moment. Il faut quand même le dire qu’en ce moment si tu parles aux personnes de la politique, ils sont contre. Ils n’ont même plus l’envie d’aller voter. Regardez dans notre classe d’âge, puisque l’on est sensiblement du même âge. Est-ce qu’ils ont envie d’aller voter ? La réponse est non ! C’est qu’il y a bien un souci. Les gens ne comprennent plus rien. Il y a trop de strates. Il y a eu la pandémie, c’est vrai. Cela n’a fait qu’accentuer tout cela.

« Le Club Démocratique des Vosges est donc un club que j’ai créé le 5 octobre 2012. C’était un peu mon lancement sur mon nom propre. J’avais réuni à peu plus de 200 personnes à Remiremont, dans ma commune. Personne ne savait à quelle sauce il allait être manger. Il venait plus par amitié, pour soutenir un jeune, qu’autre chose. C’est là que les problèmes ont commencé. [Rires]

« Ensuite je devais faire partie d’une liste aux municipales en 2014. Il y a eu d’énorme pression sur le maire. Ce dernier n’a pas pu me prendre. 2015, on s’est chahuté. Je me suis présenté dans le canton de Remiremont. Je n’ai pas gagné mais j’avais fait un score dans le canton. Cela m’a fait connaitre. Puis, je gagne l’élection municipale partielle en 2016, à Remiremont. Je deviens maire. »

Comment avez-vous vécu votre élection de maire de Remiremont en 2016 ?

« Avec le recul, souvent ma mère me le disait, ce n’est pas l’inconscience mais j’y suis allé. Il a fallu faire une équipe. Ce qui n’est déjà pas simple. On a gagné de 43 voix contre l’ancien maire, qui était tout de même le poulain de Christian Poncelet, à une certaine époque. C’est la joie de gagner, naturellement. Ce dont je me souviens, c’est d’une photo qui avait été prise avec ma future directrice générale des services. C’est la joie, l’émotion, parce que les gens avaient envie que la Ville bouge. Il pensait qu’avec moi ce serait le cas.

« Par contre, je me souviendrai toujours le premier jour où j’ai monté les escaliers de la mairie. C’est une très belle mairie. C’est un ancien palais abbatial parce que Remiremont est une ville d’un peu moins de 10’000 habitants qui a été dirigée par des femmes pendant des siècles, des chanoinesses, sous l’autorité direct du Pape. Ce jour-là, je m’en souviendrais toute ma vie. En montant les marches, j’ai senti le poids des responsabilités m’alourdir considérablement la charge sur les épaules.

« On a fait plein de choses avec une équipe de personnes novices et débutantes en politique. C’était passionnant. Avec d’ailleurs deux personnes, des deux minorités, qui m’ont rejoint ; de droite, comme de gauche. Ils ne restaient qu’à la fin que des gens qui avaient une haine viscérale contre moi parce que j’avais « battu » leurs maires à eux. Ils n’avaient pas réfléchi à la chose. Je ne pouvais rien y faire. Je ne voulais pas les récupérer dans mon équipe et eux ne voulaient pas venir avec moi.

« On a fait la rénovation du Marché Couvert avec des investisseurs privés qui ont mis 720’000 Euros dans le projet, en 4 ans. On a fait cela. Un complexe cinématographique de 7 salles, dernières générations. Parfois, c’était des projets que l’on attendait depuis 20 ans. J’ai fait venir un Hôtel 4 étoiles avec piscine, sauna, hammam et tout le tintouin. Une maison des Associations. On a armé la Police. On a racheté le Fort historique de la Ville. On a fait pleins de choses en moins de 4 ans, en diminuant le budget de 4 millions d’Euros. Là où j’ai réussi c’est que j’ai diminué mon budget en le passant d’un budget de 26 millions d’Euros à 22 millions d’Euros. Ceci toujours en moins de 4 ans. Vous vous rendez compte. »

Vous avez dû en démissionner, suite à la loi des non-cumuls, en 2020. Quel souvenir en gardez-vous ?

« J’ai quand même oublié l’essentiel : on a tout de même sauvé une maternité et un hôpital. Parce que je l’oubli. La Ville est au bord de la banqueroute. L’Hôpital était quasiment fermé, au bord de la fermeture. On revenait tout de même de loin.

« J’en garde des souvenirs passionnés et passionnants. Cela a été très formateur parce qu’il a fallu que je gère une équipe de 28 élus. Il a fallu que je gère 180 agents à la mairie. 850 personnes, sous ma responsabilité indirecte, à l’Hôpital qui était au bord de la fermeture. Il y avait les EPHAD, la Police, la Gendarmerie… De lourdes responsabilités.

« Surtout qu’au début, naturellement, les personnes, ce n’est pas qu’ils n’auraient pas misé une cacahuète, mais bon… Je peux vous assurez que pendant moins de 4 ans, nous en avons fait des choses. Si bien que j’ai été réélu avec 100% des voies. Il n’y avait aucune liste face à moi, alors que d’habitude, il y a toujours deux listes. Une petite consécration que de réussir à rassembler des personnes de gauche, des personnes de droite, au service de la Ville. C’est cela qui m’a aussi plu. »

Quel regard portez-vous sur le changement politique que la France a connu depuis l’élection à la Présidence de la République d’Emmanuel Macron en 2017 ?

« Il a fait un holdup merveilleux. Je n’ai pas voté pour lui, j’ai voté pour Jean Lassalle en 2017.

« J’ai voté Jean Lassalle parce qu’il est venu soutenir mon Hôpital. J’avais écrit aux différents candidats à la présidentielle. Celui qui m’a répondu tout de suite, c’est Jean Lassalle. Il est venu, dans un moment difficile. Je l’ai parrainé et je l’ai voté. Je n’ai pas honte de le dire. Je lui avais promis. Il m’avait promis de venir. Il est venu m’aider. J’ai tenu ma promesse. C’est une personne du terroir, qui défend ses valeurs. Il est courageux. Il s’était fait enchaîner pour défendre ses ouvriers. Il a sauvé un Hôpital.

« Emmanuel Macron, je n’ai pas voté pour lui alors je le dis d’autant plus, mais il a amené quelque chose de résolument jeune au niveau de l’incarnation de l’image présidentielle. Parfois, d’ailleurs, avec un côté arrogant qui ne plait pas aux Français. Les partis politiques traditionnels ont quand même eu du plomb dans l’aile, si vous voulez. Cela peut peut-être aussi rejoindre une autre question sur l’élection sénatoriale, c’est-à-dire que tu as tout de même un effondrement des partis classiques qu’Emmanuel Macron n’a fait qu’accentuer.

« C’est-à-dire que les personnes sont presque admiratives de dire que c’est Emmanuel Macron qui a tué la gauche, qui a quasiment tué la droite. Tout cela. Mais au fond, germait déjà, dans les partis politiques, une autodestruction. Vous voyez ce que je veux dire. Pas une autodestruction mais un effondrement interne, au fur et à mesure, voilà. Parce que tu n’avais pas de renouvellement. Parce que tu n’as pas d’idées. Surtout du fait que les personnes soient déçues de la politique, en général.

« Si vous voulez, je n’attendais rien d’Emmanuel Macron. Je n’ai pas de commentaire à faire. C’est à la fin du bal que l’on paie les musiciens. Il fait du bon. Il fait du mauvais. Comme partout. Il faut essayer de rester objectif dans ce que fait le président et même son gouvernement. On a eu les différents présidents de la République que l’on a eu. Nicolas Sarkozy, il y a eu du bon et du mauvais. François Hollande, il n’y a eu que du mauvais. [Rires] »

Comment avez-vous vécu votre expérience éphémère de président de la Communauté de Communes de Portes des Vosges Méridionales ?

« Écoutez, je pense que cela a été ma victoire politique. Je (re)gagne la mairie à 100%. Ce qui n’est pas rien.  Je gagne l’Inter-Co, mais jusqu’au dernier moment, j’ai été obligé de me battre pour en gagner la présidence. Surtout de me battre, au-delà de moi, de ma personne, de me battre pour insuffler un esprit communautaire.

« C’est tout de même le maire de la commune centrale qui dit cela. La Ville-centre est tout de même précaire au niveau budgétaire. Il faut que l’on fasse attention à tout. Mon successeur continue à faire attention à tout. C’est le problème parfois en France où tu as des guerres de clochers. Chacun joue pour soi. C’est là où je vois qu’avec Catherine Louis, qui m’a succédé, qu’il y a un esprit qui se créé. On fait des choses ensemble. Cela avance.

« C’était plus une victoire personnelle, certes. Mais aussi une victoire collective. Mais ricrac parce que pareil, personne ne misait une cacahuète sur ma personne ce soir-là. [Rires]

« J’avais lancé des projets en tant que vice-président à l’économie ; qui sont d’ailleurs en train d’aboutir pour certains. En tant que président, je vous le dis, c’est plus l’esprit. Il y a eu des projets. Je continue à les soutenir car je suis toujours élu conseiller communautaire et municipal. Cela continue mais ce n’est vrai qu’en 4 mois … En plus il y a eu la sénatoriale entre temps. Il ne faut pas se raconter de salades. »

Le chemin électoral continue pour vous. Vous êtes élu à 34 ans sénateur des Vosges, faisant de vous l’un des dix plus jeunes sénateurs de la législature. Comment avez-vous vécu ce nouveau mandat ?

« C’est passionnant. Pour ma part, il y a deux piliers de l’action sénatoriale.

« Il y a, naturellement, le pilier national avec tout ce que l’on fait au niveau législatif. Il y a un gros travail législatif qui est fait au niveau du Sénat. On voit bien qu’en Commission Mixte Paritaire, le Sénat remporte souvent la mise. Que d’ailleurs le Sénat, sous l’impulsion du Président Larcher, a une nouvelle image. Beaucoup dise qu’heureusement qu’il y a le Sénat, comme contre-pouvoir, sinon… Il y a donc tout ce travail national. Ce pour quoi l’on est élu, entre nous soit dit.

« Il y a un autre versant, qui me plait, c’est le côté « aider les maires dans mon territoire » ; les élus dans mon territoire. D’ailleurs, lorsque tu aides les élus dans ton territoire, tu aides aussi la population. Parce que cette dernière ne comprend pas toujours pourquoi les sénateurs ne sont pas élus directement par eux. Entre nous soit dit, c’est ce qui permet tout de même une certaine stabilité institutionnelle. Je ne vous apprends rien. Ceci entre l’Assemblée qui peut être dissoute directement par le président de la République et nous qui sommes « la continuité des Territoires ».

« Il y a le côté législatif, débats nationaux. La construction du concret au service des Vosgiens et des Vosgiennes, c’est important pour moi. Je le dis d’autant plus parce qu’il n’y a plus d’enveloppe parlementaire. Il faut aller « chercher de l’argent » au niveau des Institutions et dans le privé. Je retrouve un peu ce que je faisais en tant que maire. J’essaye de faire le lien.

« J’essaye également de montrer ce que je fais d’un point de vue national ; d’amener également une nouvelle image. Là, on va faire « les Cafés du sénateur ». Je vais aller à la rencontre des personnes. En moins d’un an, j’ai déjà refait 250 visites de communes, sur un territoire qui en a 507. Je continue d’aller à la rencontre de mes élus.

« Je suis fier de les représenter parce que c’est grâce à eux que j’ai été élu, naturellement, mais il faut que je travaille. Vous voyez ce que je veux dire. Ce que je souhaite c’est travailler pour qu’il y ait du concret au niveau national et local. Je n’aime pas les choses où tu te tritures l’esprit. Voilà ! Cela est quelque chose de concret. »

M. Jean Hingray, sénateur des Vosges. ©droits réservés

Comment appréhendez-vous votre expérience de sénateur ?

« Tout ce qui touche à l’éducation, c’est quelque chose qui me botte.

« Je me suis retrouvé à m’occuper de l’enseignement supérieur, avec d’autres collègues, pour mon groupe. Au bout d’un ou deux mois que j’étais ici, j’ai amendé la loi pluriannuelle d’investissement pour l’Université, du mois de novembre dernier, si mes souvenirs sont bons. Ce qui avait fait pas mal le buzz. Ce qui a fait, que de manière concrète, j’ai pu faire changer la loi et de mettre en place un dispositif expérimental pour le recrutement des professeurs d’Universités. C’était intéressant.

« Il y a eu ensuite le temps fort sur le ticket-restaurant étudiant. C’était un débat intéressant. Ceci en tenant compte du financement de ce ticket. Ce qui est bien c’est que dans quelques jours, cela va passer à l’Assemblée nationale. Cela fait plaisir parce que l’on se dit qu’il y a du chemin qui a été fait entre le moment où on l’a lancé avec mon collègue Pierre-Antoine Lévi et là où c’est repris à l’Assemblée nationale. »

M. Jean Hingray, sénateur des Vosges. ©droits réservés

Quel regard avez-vous sur votre rôle de président de la mission d’information en faveur de l’égalité des chances et émancipation de la jeunesse ?

« Les travaux aboutissent. Je rends d’ailleurs le rapport demain avec ma collègue, Monique Lubin. On cherche des propositions qui vont au-delà des clivages politiques. Je dis souvent, sur le ton de la boutade, mais c’est à peu près vrai, quand tu commences une mission sur la jeunesse, à droite on me dit de remettre en place le Service militaire. Même si l’on voit qu’Arnaud Montebourg le propose. [Rire] À gauche, on me demande le RSA Jeune. Je caricature, c’est volontaire. Mais on est arrivé dans quelque chose d’instructif et d’intéressant. On a trouvé une vingtaine de propositions. Alors, après, lorsque tu es président, tu présides. Lorsque tu es rapporteur, tu écris un rapport.

« Ce que je regrette c’est que quelques propositions ne soient pas chiffrées. Vous savez, parfois vous avez des propositions où c’est une volonté de dire que par exemple il faut dédoubler les classes en milieu rural. Ce qui est très bien mais combien cela coûte ? Vous comprenez ce que je veux dire.

« En fait cela rejoint un peu le reste. C’est-à-dire que tu as beaucoup d’argent qui est mis sur la jeunesse mais, une fois de plus, tu as trop d’acteurs. Comme il y a trop d’acteurs, les jeunes ne savent pas vers qui se retourner. Il y a un gros travail à faire sur la jeunesse. On est jeune !

« Je pense qu’il y a un vrai problème de travail dans ce pays. Les gens ne veulent plus travailler, pour la plupart. Il faut remettre la France au travail. Mais qu’en même temps, il faut aider les jeunes en difficultés, et les moins jeunes naturellement. Il ne faudrait pas que l’on se tire une balle dans le pied, vous voyez. Puisque si l’on se tire une balle dans le pied, ce sont les futures générations qui vont continuer à payer la dette et le pays va s’appauvrir donc on ne pourra plus forcément aider.

« C’est un travail intéressant cette mission, qui pose les bases pour l’avenir, vous voyez. Le souci c’est que l’on arrive à la fin du quinquennat. Le calendrier législatif est donc très resserré jusqu’à sa fin, si vous voulez. Sur le ticket-restaurant étudiant, je vous avoue que je suis étonné que cela repasse déjà bientôt à l’Assemblée nationale. Je vais voir comment Anne-Laure Blin a réussi son coup. Elle s’est bien débrouillée ! »

Comment appréhendez-vous l’année présidentielle qui s’annonce ?

« Cela va être passionnant, c’est sûr. J’attends voir, pas comment cela va tourner, si vous voulez, même si je suis sénateur maintenant, mais je suis toujours un peu, pas en retrait, mais, comment dire, en attente d’un discours de vérité. Surtout de personnes qui vont faire des choses. Parce que c’est bien beau de dépenser de l’argent que l’on n’a pas mais il va quand même falloir, à un moment ou un autre, trouver des solutions. On peut continuer à laisser partir le pays à vau-l’eau… donc j’attends.

« Pour l’instant je serais plus spectateur, qu’acteur. Je fais surtout mon travail sénatorial à fond. J’ai eu plein de propositions. Ce n’est pas le souci. J’attends de voir comment se positionne la suite. Je suis embêté car les propositions sont superbes.

« Ensuite, il y a Éric Zemmour qui arrive. Comment cela va tourner ? Je ne sais pas. Comme beaucoup d’ailleurs ; pas que les élus. On est en attente. »

Quel regard portez-vous sur la pandémie mondiale qui nous touche ?

« J’espère que cela va se terminer, comme beaucoup de monde.

« Vous voyez, sur les aides économiques aux entreprises, le gouvernement s’est bien débrouillé. Alors, après, dans la gestion de crise, il y a eu des âneries qui ont été dites et qui ont été faites. Cela fait partie des crises que l’on peut parfois vivre.

« C’est un moment difficile, où les Français ont fait beaucoup d’effort. Cela devrait nous permettre de rebondir. J’ai plutôt le sentiment que finalement, ce n’est pas que l’on ne rebondit pas mais c’est qu’il y a eu un sursaut, on va dire, de la population qui a envie de travailler ; qui a envie de faire les choses. Il y a eu un repli, d’une partie des Français, qui ont touché des aides et qui sont bien content de les avoir eus. Il y a eu l’addition des deux.

« Mon inquiétude principale c’est comment va-t-on gérer cela ? Comment l’actuel et le prochain président de la République vont gérer cela ? C’est cela le plus compliqué. Ce sera de voir comment ces 2 France, qui commence, entre nous soit dit, à se détester, vont pouvoir vivre ensemble. »

Quel est votre rapport avec les réseaux sociaux ?

« J’aime bien parce que cela te permet d’avoir des liens avec des personnes que tu ne voies pas souvent ; qui fait quoi ? En même temps, vous voyez, cela fait quelques semaines que je n’ai pas communiqué sur mon Facebook. C’est moi qui le gère. Je fais énormément de choses mais je n’ai pas l’envie de le communiquer. Les personnes me poussent à le faire.

« Je suis inquiet sur la dérive qu’il y a eu, par exemple, sur les enfants nés en 2010. Cela fait tout de même peur parce que tu te dis qu’à partir des réseaux sociaux tout peut partir en vrille.

« Cela fait de belles choses mais cela fait aussi de moins belles ; donc je suis assez perplexe. Je les utilise un peu plus là parce que j’ai mis quelqu’un dessus. Je ne sais pas. Il faut vivre avec son temps. Ce que je fais largement. Le gros souci, aussi, c’est que j’ai un gros problème de temps. Communiquer, c’est un métier. Cela prend du temps, que je n’ai pas forcément. Dans mon équipe non plus, d’ailleurs. Quand tu es parlementaire, les gens pensent que tu as des grosses équipes. Les équipes sont toutes petites. »

***

Merci à M. Hingray pour son écoute et sa participation à ce portrait.

 

 

Publié par RomainBGB

Franco-sicilien né en Helvetie. Co-auteur de l'ouvrage "Dans l'ombre des Présidents" paru en mars 2016 aux éditions Fayard.

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